INSPE ANGERS - M1

Didactique de l'écriture

Les réécritures

La réécriture au cycle 3

Au cycle 3, les élèves s’engagent davantage dans la pratique d’écriture, portent davantage attention aux caractéristiques et aux visées du texte attendu. Les situations de réécriture et de révision menées en classe prennent toute leur place dans les activités proposées. La réécriture peut se concevoir comme un retour sur son propre texte, avec des indications du professeur ou avec l'aide des pairs, mais peut aussi prendre la forme de nouvelles consignes, en lien avec l’apport des textes lus. Tout comme l’écrit final, le processus engagé par l’élève pour l’écrire est valorisé. À cette fin sont mis en place brouillons, écrits de travail, versions successives ou variations d'un même écrit, qui peuvent constituer des étapes dans ce processus. L’élève acquiert ainsi progressivement une plus grande autonomie et devient de plus en plus conscient de ses textes.

Ministère de l'Éducation Nationale (2023). Programme du cycle 3.

Les consignes de réécriture

Soit le texte de Lucie (Bourque, 1994). Proposez une ou plusieurs consignes de réécriture.

Cohésion et cohérence

De la même manière qu'une phrase n'est pas constituée d'un tas de mots, mais que doivent être respectées des règles de leur agencement pour constituer une phrase syntaxiquement correcte, dont les grammaires essaient de rendre compte, un texte n'est pas une suite de phrases sans règle d'enchainement. Depuis la fin des années 1970, des linguistes, comme M. Charolles (1978) ou M.-J. Bèguelin (1992)3, s'appliquent à définir des règles de cohérence textuelle. Rappelons que l'étymologie du mot "texte" est "tissage", "tissu". Les pronoms personnels de reprise de troisième personne, le choix des temps verbaux, les connecteurs assurent ce que les linguistes appellent la cohésion du texte. Les marques de cohésion textuelle facilitent la compréhension des liens entre les phrases par le lecteur et guident son interprétation. Dans un récit, ces marques sont particulièrement importantes pour assurer le repérage des personnages, des lieux et de la temporalité. [...] La cohérence, elle, est un effet produit sur le lecteur, qui construit sa compréhension du texte en s'appuyant sur les marques de cohésion et en mettant en relation le contenu linguistique du texte et ses connaissances encyclopédiques et culturelles. La cohérence est donc l'effet d'un calcul interprétatif du lecteur.

Garcia-Debanc, C. (2022). Former les enseignant·es à l'évaluation de la cohérence/cohésion textuelle dans des textes narratifs. Pratiques, 195‑196.

Réécrire et récrire

En matière de fiction, deux choix d'amélioration se posent. 1. Réécrire, ou écrire de nouveau, par- dessus ce qui est déjà là, qui implique des manoeuvres de redressement, de correction, en tenant surtout compte de règles normées, que ce soient la cohérence, la grammaire, l'orthographe... 2. Récrire, ou écrire du nouveau, et qui engage une complicité avec ce qui se trouve déjà écrit, selon des manoeuvres d'exploration, d'exploitation et de fructification à l'endroit des mécanismes singularisant le texte. Si le premier choix, réécrire, commande chez qui s'y affaire une connaissance experte des codes et des règles, le second, récrire, exige une disponibilité de lecture associée à une compétence d'écriture susceptible de caractériser autant les habiletés de l'élève que les aptitudes de l'enseignant. Dès lors, puisque se trouve ici mise en cause une écriture particulière, celle du texte de fiction, le second choix, récrire, va pour au moins trois raisons, se montrer plus approprié. D'abord parce que, par nature, il cherche à fournir une amélioration qui s'adapte aux structures de texte déjà en place ; ensuite, en vertu du fait qu'il se montre soucieux d'opérer une intégration formelle et sémantique des fragments de texte retravaillés ; enfin, pour ce qu'il s'emploie à faire fructifier les mécanismes singularisant l'écriture qu'il convoite.

Bourque, G. (1994). Écrire, réécrire, récrire. Québec français, (93), 27–30.

L'accompagnement de l'écriture

L'enseignant est davantage celui qui crée des espaces pour l'investissement subjectif de l'élève, qui travaille avec le temps long pour permettre la maturation de la pensée et des apprentissages, la mise à distance des affects, qui prend appui sur le rôle décisif des interactions entre pairs. Il est un enseignant qui lit de manière curieuse et bienveillante, non les erreurs et les manques, mais cherche où le texte va, ses germes prometteurs, pour donner une nouvelle consigne permettant à l'élève de développer ou d'ouvrir d'autres pistes. [...] L'activité d'écriture, intense, a besoin d'arrêts, de reprises, de retours-modifications. Sa dynamique n'est ni linéaire ni facilement gouvernable. C'est aussi le temps de l'exploration, de l'ajustement, des problèmes de langue, de la digestion-appropriation de leçons...

Bucheton, D. (2014). Refonder l'enseignement de l'écriture. Retz.

Les neuf versions de Yoko

Dans Refonder l'enseignement de l'écriture (2014), Bucheton évoque le cas de Valérie, une élève sérieuse, qui a rendu, avec son texte définitif, ses neuf brouillons.

Selon vous, quelles conditions sont nécessaires pour amener les élèves à accepter de réécrire leur texte ?

Le sujet écrivant

Raconter une histoire (qu’elle soit conte ou nouvelle, ou épopée…) ce n'est pas seulement obéir aux formes canoniques des genres (dont d’ailleurs on ne saisit au mieux que les stéréotypes), c'est donner du sens au monde, en organiser les significations par le biais de la métaphore narrative. Mettre en ordre un monde intérieur, ou bien justement se l’approprier, tisser des liens entre ce que je suis et ce que je sais, élaborer l’émotion, mettre au jour ce qui me tient à cœur. Ainsi, on passe parfois des heures et des heures depuis les petites classes à mettre en tableau et en fiches situation initiale, objet magique, adjuvants, opposants et autres complications, et on garde peu de temps pour mettre au travail par l’écriture ce qui est au centre même des récits et qui en constitue le fondement anthropologique : les grandes angoisses, les désirs, révoltes, quêtes ambiguës, contradictoires, toujours entravées, du bonheur et du pouvoir, de la fraternité et de l'obéissance filiale, de l'aventure et du besoin de sécurité, thèmes où toujours s'enchevêtrent ceux, puissants, de la vie et de la mort.

Bucheton, D., Chabanne, J.-C. (2002). Écrire en Zep : Un autre regard sur les écrits des élèves. Delagrave, CRDP.

La posture d'auteur

Développer une relation esthétique entre auteur et lecteur suppose une modification du contrat didactique ordinaire. Dans le nouveau contrat, [...] on lit les textes des élèves, non comme des "productions" (manufacturées ?) mais comme des textes d'auteurs. On peut apprécier plus ou moins un texte d'auteur mais on ne le lit pas avec l'idée qu'il présente des dysfonctionnements. Dans le nouveau contrat, les pairs ne sont pas d'abord des évaluateurs mais un public mis à la disposition de l'auteur pour qu'il puisse tester l'effet produit de son écriture et lui permettre, si nécessaire, de mieux conscientiser ce qu'il a fait ou devrait faire.

Tauveron, C. (2001). L'écriture littéraire : une relation dialectique entre intention artistique et attention esthétique. Repères, recherches en didactique du français langue maternelle, n°26-27, 2002

Formes et conditions de la réécriture

Lisez le texte sur la réécriture disponible sur Eduscol. Qu'en retenez-vous ?

La réécriture au cycle 4

Exemples de situations, d’activités et d’outils pour l’élève : Réécriture de textes issus de la littérature ou de la presse afin de modifier leur orientation argumentative. [...] Repérage des temps verbaux et identification du système des temps utilisés ; réécriture de textes avec changement de temps.

Les élèves peuvent également examiner les résonances ou les écarts entre les œuvres antiques et les œuvres modernes et contemporaines ; ils peuvent constituer des collections d’œuvres, s’en inspirer pour des réécritures personnelles ou pour l’étude de transpositions modernes des vieux mythes (théâtre, cinéma, roman, poésie, etc.)

Ministère de l'Éducation Nationale (2020). Programme du cycle 4.

Une situation de classe

L’enseignante propose une définition : "Les caractéristiques de l'épopée sont la violence, les images produites par le texte et les comparaisons. Dans le chapitre de Charybde et Scylla, la peur est aussi une dominante importante." Les élèves doivent noter.

L'enseignante poursuit avec une consigne : "Pour ceux qui ont fini, vous reprenez votre texte sur les sirènes et vous le relisez. Je vous laisse cinq minutes pour relire le texte." Les élèves semblent réticents. L’enseignante insiste : "je vous conseille de le relire parce qu'après je vais ramasser." Elle écrit, pendant que les élèves relisent, la consigne au tableau : "Activité 3 : réécriture. Réécrivez la rencontre avec les sirènes en mobilisant différentes caractéristiques de l'épopée : la violence, la peur, la comparaison."

Les élèves paraissent perplexes. L'un d'entre eux demande : "Du coup on invente ?" L'enseignante demande qui n'a pas compris. Un nombre important d'élèves lèvent la main. Plusieurs explications, de l'enseignante, puis des élèves qui ont compris, se succèdent. L'un des élèves explique ainsi à ses camarades : "on va réécrire. On va pas recopier. Mais on va faire la même chose, en ajoutant de la violence." Un autre élève demande : "On rajoute des mots ?"

Compte-rendu de visite de ..., février 2024.

Travailler avec l'IA

Soit les textes suivants. Quelles consignes de réécriture pourraient être données ?

Prochain rendez-vous

Lundi 25/03 9h-12h : ...