Les grammaires traditionnelles définissent la notion de complément circonstanciel sur des bases exclusivement sémantiques et, à l'origine, rhétoriques. Or beaucoup des relations qui lient un circonstant au reste de la phrase peuvent également unir tel verbe à l'un de ses actants. Fautes de critères formels, et , corollairement, d'une définition ( syntaxique et sémantique ) du mode de liaison circonstanciel, la grammaire traditionnel ne peut valablement distinguer entre compléments du verbe et compléments de la phrase.
Grammaire méthodique du français, Riegel, Pellat, Rioul, PUF, 1994
Troisième constituant majeur de la phrase de base, le complément circonstanciel ( ou circonstant )se distingue des deux autres constituants immédiats de la phrase, le GN sujet et le GV, par trois propriétés formelles: il est facultatif ( 1 ), se démultiplie librement ( 2 ) et est mobile dans les limites de la phrase entière ( 3 ).
La mobilité est la propriété vraiment caractéristique du complément circonstanciel. Cette propriété s'explique par son statut syntaxique de constituant périphérique: comme constituant immédiat de la phrase, il ne dépend pas d'un autre syntagme et en particulier, il n'est pas régi par le verbe. A la différence des compléments du verbe, il ne fait pas partie de la valence verbale.
Grammaire méthodique du français, Riegel, Pellat, Rioul, PUF, 1994
Le circonstanciel définit une fonction dans la phrase, fonction qui peut être occupée par des éléments de diverses catégories. Il s'agit essentiellement:
- de GP: "Il dort dans la chambre";
- d'adverbes: "Dorénavant il ne sera plus invité";
- de phrases: à verbe à temps fini ( "Il vient quand on l'invite" ) ou à temps non fini ( "Paul partant, Marie a pu rester", "Avant de venir, il s'est reposé" );
- de certains GN, mais il s'agit de séries lexicales particulières: "Il part le soir".
En dépit de cette diversité catégorielle, la position de circonstanciel est fondamentalement une position de GP. Les phrases circonstancielles se laissent souvent analyser en ( Préposition + Phrase ): avant + que je vienne... Quand aux adverbes, ils se paraphrasent le plus souvent par des GP: habituellement="de manière habituelle"...
Précis de grammaire pour les concours, D. Maingueneau, Nathan, 2001 ( troisième édition )
L'intérêt pour la problématique de l'énonciation a attiré l'attention sur un type particulier d'adverbes, ceux qui portent sur l'acte d'énonciation ou qui modalisent l'énoncé. Ces adverbes de phrase en sont détachés: ils se situent à un niveau supérieur pour commenter la phrase proprement dite. On ne les confondra pas avec les circonstanciels qui, eux, sont intégrés à la phrase.
Précis de grammaire pour les concours, D. Maingueneau, Nathan, 2001 ( troisième édition )
Fonction extérieure au noyau que forment le GN sujet et le GV, le complément circonstanciel n'a pas de place fixe. Cette mobilité est liée au fait que les éléments en position de circonstanciel d'une phrase ne dépendent pas de la tête d'un groupe. La place du circonstanciel a une incidence importante sur la progression thématique, c'est-à-dire la manière dont le texte hiérarchise et répartit les informations qu'il pose comme données et celles qu'il pose comme nouvelles, mais sans que cela modifie les relations syntaxiques. Les places les plus fréquemment occupées se trouvent au début et surtout à la fin de la phrase, à sa périphérie donc. Mais ici interviennent de multiples facteurs: en particulier la longueur et la signification du circonstanciel, la nature du GN sujet et du GV, etc.
Précis de grammaire pour les concours, D. Maingueneau, Nathan, 2001 ( troisième édition )
Même s'il possède une valeur spatiale, un complément peut fort bien être complément d'un verbe; on retrouve ici la classique distinction entre compléments essentiels, appelés par le verbe et inclus dans le GV, et compléments circonstanciels, qui sont en nombre illimités. En principe, le complément du verbe n'est pas déplaçable ( "*A Laon je pars" ) et il est obligatoire ( ou sous-entendu: "Paul fume" ).
Les cas ne sont malheureusement pas toujours aussi tranchés. Pour un énoncé comme "je travaille avec joie", on accordera sans difficulté que le GP appartient au GV, où il joue le même rôle qu'un adverbe de manière orienté vers l'agent du procès. Mais que dire pour "Paul voyage par plaisir" où le complément n'est pas aussi indépendant du procès que des compléments de lieu ou de temps" ?
Précis de grammaire pour les concours, D. Maingueneau, Nathan, 2001 ( troisième édition )
On oublie souvent que les GN également peuvent contenir des circonstanciels. C'est particulièrement évident pour ceux dont la tête est un nom déverbal, puisqu'ils sont construits en parallèle avec des phrases:
( La rééducation de Luc dans un camp ) m'a choqué
Mais les possibilités de déplacement sont très limitées ( "La rééducation dans un camp de Luc"... ).
Les noms déverbaux ne sont pas les seuls concernés; les GA aussi:
Un homme ( célèbre à Rome ) peut être ignoré ici
En effet, ici la relation entre les constituants du GN est la même qu'entre un GN sujet et un GV en être: "Un homme ( est ) célèbre à Rome".
Précis de grammaire pour les concours, D. Maingueneau, Nathan, 2001 ( troisième édition )