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Problématique :
1. Que signifie, pour vous, le titre ?
Observez ces deux couvertures. Que suggèrent-elles ?
1. Lisez, à plusieurs voix, la première scène.
2. Que va-t-il, selon vous, se passer ? Écrivez une suite.
Comment le mot "romantique" est-il formé ? Quels sont ses différents sens ?
Imaginez et dessinez, pour deux des personnages présents dans l'acte I, un costume. Vous justifierez vos choix.
Observez les costumes ci-contre. Quels choix ont été opérés et pourquoi ?
Observez les costumes ci-contre. Quels choix ont été opérés et pourquoi ?
Lisez à deux voix le passage qui, dans la scène II, 5, va de "J'ai pour amie une sœur..." à "...les matelas de crin"
1. Que pensez-vous de la réponse de Perdican ?
2. Selon vous, lequel des deux personnages a raison ?
Quelle vision de l'éducation est proposée dans cette pièce ?
Perdican.
Sais-tu ce que c’est que des nonnes, malheureuse fille ? Elles qui te représentent l’amour des hommes comme un mensonge, savent-elles qu’il y a pis encore, le mensonge de l’amour divin ? Savent-elles que c’est un crime qu’elles font, de venir chuchoter à une vierge des paroles de femme ? Ah ! comme elles t’ont fait la leçon ! Comme j’avais prévu tout cela quand tu t’es arrêtée devant le portrait de notre vieille tante ! Tu voulais partir sans me serrer la main ; tu ne voulais revoir ni ce bois, ni cette pauvre petite fontaine qui nous regarde tout en larmes ; tu reniais les jours de ton enfance, et le masque de plâtre que les nonnes t’ont plaqué sur les joues, me refusait un baiser de frère ; mais ton cœur a battu ; il a oublié sa leçon, lui qui ne sait pas lire, et tu es revenue t’asseoir sur l’herbe où nous voilà. Eh bien ! Camille, ces femmes ont bien parlé ; elles t’ont mise dans le vrai chemin ; il pourra m’en coûter le bonheur de ma vie ; mais dis-leur cela de ma part : le ciel n’est pas pour elles.
CAMILLE.
Ni pour moi, n’est-ce pas ?
Perdican.
Adieu, Camille, retourne à ton couvent, et lorsqu’on te fera de ces récits hideux qui t’ont empoisonnée, réponds ce que je vais te dire : Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux ou lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; le monde n’est qu’un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c’est l’union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière, et on se dit : J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j’ai aimé. C’est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui.
Alfred de Musset, On ne badine pas avec l'amour, II, 5, 1834.
Selon vous, la bonne éducation est-elle celle qui consiste à ignorer les sexes et les genres ?
En vérité, l'influence de l'éducation et de l'entourage est ici immense. [...]
Ainsi, la passivité qui caractérisera essentiellement la femme "féminine" est un trait qui se développe en elle dès ses premières années. Mais il est faux de prétendre que c'est là une donnée biologique ; en vérité, c'est un destin qui lui est imposé par ses éducateurs et par la société. L'immense chance du garçon, c'est que sa manière d'exister pour autrui l'encourage à se poser pour soi. Il fait l'apprentissage de son existence comme libre mouvement vers le monde, il rivalise de dureté et d'indépendance avec les autres garçons, il méprise les filles. Grimpant aux arbres, se battant avec des camarades, les affrontant dans des jeux violents, il saisit son corps comme un moyen de dominer la nature et un instrument de combat ; il s'enorgueillit de ses muscles comme de son sexe ; à travers jeux, sports, luttes, défis, épreuves, il trouve un emploi équilibré de ses forces ; en même temps, il connaît les leçons sévères de la violence ; il apprend à encaisser les coups, à mépriser la douleur, à refuser les larmes du premier âge. Il entreprend, il invente, il ose. Certes, il s'éprouve aussi comme "pour autrui", il met en question sa virilité et il s'ensuit par rapport aux adultes et aux camarades bien des problèmes. Mais ce qui est très important, c'est qu'il n'y a pas d'opposition fondamentale entre le souci de cette figure objective qui est sienne et sa volonté de s'affirmer dans des projets concrets. C'est en faisant qu'il se fait être, d'un seul mouvement. Au contraire, chez la femme il y a, au départ, un conflit entre son existence autonome et son "être-autre" ; on lui apprend que pour plaire il faut chercher à plaire, il faut se faire objet ; elle doit donc renoncer à son autonomie. On la traite comme une poupée vivante et on lui refuse la liberté ; ainsi se noue un cercle vicieux ; car moins elle exercera sa liberté pour comprendre, saisir et découvrir le monde qui l'entoure, moins elle trouvera en lui de ressources, moins elle osera s'affirmer comme sujet ; si on l'y encourageait, elle pourrait manifester la même exubérance vivante, la même curiosité, le même esprit d'initiative, la même hardiesse qu'un garçon. C'est ce qui arrive parfois quand on lui donne une formation virile ; beaucoup de problèmes lui sont alors épargnés. Il est intéressant de noter que c'est là le genre d'éducation qu'un père dispense volontiers à sa fille ; les femmes élevées par un homme échappent en grande partie aux tares de la féminité. [...]
Une des malédictions qui pèse sur la femme – Michelet l'a justement signalée – c'est que, dans son enfance, elle est abandonnée aux mains des femmes. Le garçon aussi est d'abord élevé par sa mère ; mais elle a du respect pour sa virilité et il lui échappe très vite ; tandis qu'elle entend intégrer la fille au monde féminin. [...]On lui donne donc pour amies d'autres petites filles, on la confie à des professeurs féminins, elle vit parmi les matrones comme au temps du gynécée, on lui choisit des livres et des jeux qui l'initient à sa destinée, on lui déverse dans les oreilles les trésors de la sagesse féminine, on lui propose des vertus féminines, on lui enseigne la cuisine, la couture, le ménage en même temps que la toilette, le charme, la pudeur ; on l'habille avec des vêtements incommodes et précieux dont il lui faut être soigneuse, on la coiffe de façon compliquée, on lui impose des règles de maintien : tiens-toi droite, ne marche pas comme un canard ; pour être gracieuse, elle devra réprimer ses mouvements spontanés, on lui demande de ne pas prendre des allures de garçon manqué, on lui défend les exercices violents, on lui interdit de se battre : bref, on l'engage à devenir, comme ses aînées, une servante et une idole. Aujourd'hui, grâce aux conquêtes du féminisme, il devient de plus en plus normal de l'encourager à faire des études, à s'adonner aux sports ; mais on lui pardonne plus volontiers qu'au garçon d'y mal réussir ; on lui rend plus difficile la réussite en exigeant d'elle un autre genre d'accomplissement : du moins veut-on qu'elle soit aussi une femme, qu'elle ne perde pas sa féminité.
Simone de Beauvoir, Le Deuxième sexe, tome II, "L'expérience vécue", 1949, éd. Folio Essais.
1. Faites l'inventaire des lieux proposés dans l'acte II.
2. Faites une proposition de scénographie. Vous justifierez vos choix.
Perdican.
Regarde à présent cette bague. Lève-toi et approchons-nous de cette fontaine. Nous vois-tu tous les deux, dans la source, appuyés l’un sur l’autre ? Vois-tu tes beaux yeux près des miens, ta main dans la mienne ? Regarde tout cela s’effacer. (Il jette sa bague dans l’eau.) Regarde comme notre image a disparu ; la voilà qui revient peu à peu ; l’eau qui s’était troublée reprend son équilibre ; elle tremble encore ; de grands cercles noirs courent à sa surface ; patience, nous reparaissons ; déjà je distingue de nouveau tes bras enlacés dans les miens ; encore une minute, et il n’y aura plus une ride sur ton joli visage : regarde ! c’était une bague que m’avait donnée Camille.
Camille, à part.
Il a jeté ma bague dans l’eau.
Perdican.
Sais-tu ce que c'est que l'amour, Rosette ? Écoute ! Le vent se tait ; la pluie du matin roule en perles sur les feuilles séchées que le soleil ranime. Par la lumière du ciel, par le soleil que voilà, je t'aime. Tu veux bien de moi, n'est-ce pas ? On n'a pas flétri ta jeunesse ? on n'a pas infiltré dans ton sang vermeil les restes d'un sang affadi ? Tu ne veux pas te faire religieuse ; te voilà jeune et belle dans les bras d'un jeune homme ; ô Rosette, Rosette, sais-tu ce que c'est que l'amour ?
Rosette.
Hélas ! monsieur le docteur, je vous aimerai comme je pourrai.
Perdican.
Oui, comme tu pourras ; et tu m'aimeras mieux, tout docteur que je suis, et toute paysanne que tu es, que ces pâles statues fabriquées par les nonnes, qui ont la tête à la place du cœur, et qui sortent des cloîtres pour venir répandre dans la vie l'atmosphère humide de leurs cellules ; tu ne sais rien ; tu ne lirais pas dans un livre la prière que la mère t'apprend, comme elle l'a apprise de sa mère ; tu ne comprends même pas le sens des paroles que tu répètes, quand tu t'agenouilles au pied de ton lit ; mais tu comprends bien que tu pries, et c'est tout ce qu'il faut à Dieu.
Rosette.
Comme vous me parlez, monseigneur !
Perdican.
Tu ne sais pas lire ; mais tu sais ce que disent ces bois et ces prairies, ces tièdes rivières, ces beaux champs couverts de moissons, toute cette nature splendide de jeunesse. Tu reconnais tous ces milliers de frères, et moi pour l'un d'entr'eux ; lève-toi ; tu seras ma femme, et nous prendrons racine ensemble dans la sève du monde tout-puissant.
(Il sort avec Rosette.)
Alfred de Musset, On ne badine pas avec l'amour, III, 3, 1834.