Exposés : l'anorexie ; les prothèses intelligentes ; les transgenres ; les gueules cassées ; les implants électroniques...
Quelques films : Million Dollar Baby, Laurence anyways.
Selon vous, quel est l'objectif du projet "Selfie Harm" de l'artiste et photographe Rankin ?
Photos extraites de la série "Selfie Harm project" par Rankin pour la campagne "Visual Diet", 2019.
Contractez le texte en 100 mots.
Selon vous, la beauté "naturelle" est-elle plus séduisante que la beauté "artificielle" ?
1. Dysmorphie : Déformation d'une partie du corps.
Avec l'explosion du selfie et des applis type FaceTune, la culture retouche s'est imposée, surtout chez les jeunes. Une image déformée de soi-même qui n'est pas sans risque
Pour Carla, lycéenne de 17 ans, modifier son visage avant de poster une story sur Instagram, c'est "la nouvelle norme" : "Tout le monde le fait, même ceux qui se sentent bien dans leur peau. Moi, je passe l'image sur FaceTune, pour un effet lissé, sans boutons. Mais je n'abuse pas. J'ai des copines qui se font une peau orange, des yeux de poupée et un corps trop retouché. Tout le monde sait que c'est fake, mais ça les aide à se donner une image." Pour Lena, Parisienne de 12 ans, "les filtres, c'est comme une drogue, ça peut te rendre jalouse de toi-même, parce que tu voudrais être celle qu'on voit avec les effets". Et si l'on en croit les chirurgiens plasticiens américains, nombre de leurs jeunes patients n'auraient qu'un désir : ressembler à leur "avatar" amélioré. Les spécialistes ont même trouvé un nom à ce nouveau mal : la "Snapchat dysmorphia"1 - d'après le nom de cette messagerie très prisée des ados, l'une des premières à avoir lancé les filtres de retouches, appelés lenses ("optiques"). [...]
En Chine, où Instagram est interdit par la censure, c'est l'appli Meitu (littéralement "belle image"), créée en 2008, qui est un phénomène de société. Les femmes chinoises, utilisatrices de l'appli à 80 %, sont très friandes de selfies hyper-retouchés, façon stars de K-Pop. Chaque mois, près de 500 millions de personnes postent ainsi leur visage "amélioré", selon le South China Morning Post. Yeux bridés agrandis, arcade du nez augmentée, peau blanchie : pour beaucoup de jeunes femmes, la retouche numérique de leur visage serait même une alternative à la chirurgie dans un pays qui devrait devenir cette année le troisième plus grand marché pour ce secteur, après le Brésil et les Etats-Unis, selon une enquête conduite par HSBC en Chine en 2017.
[...]Le marketing s'est évidemment emparé de cette "culture du filtre". L'un des best-sellers de Fenty Beauty (la marque de maquillage de Rihanna) se nomme Pro Filt'r. Chez Nyx, on trouve une poudre de finition #NoFilter, et chez Huda Beauty, un fond de teint haute couvrance appelé #FauxFilter. [...] Certains voient encore plus loin, comme Dior, qui se lance carrément dans le make-up virtuel. En décembre 2019, la marque de luxe proposait un filtre en réalité augmentée pour tester sa nouvelle collection, pour un effet 3D. On appelle ça le digital make-up, et pour Peter Philips, directeur de la création et de l'image du maquillage Christian Dior, "c'est l'avenir du maquillage".
Séverine Pierron, Le Monde, "Miroir, dis-moi qui est la plus filtrée", 20 janvier 2020.
Ingres, La Grande Odalisque, 1814.
Complétez le poème.
1. Comment le poète décrit-il l'apparence de ces "êtres singuliers" ?
2. Quels sont verbes de mouvements utilisés ? Que montrent-ils ?
3. Montrez comment, dans ce texte, "l'horreur tourne aux enchantements".
Que nous dit ce poème sur le corps ?
Dans les plis sinueux des vieilles capitales,
Où tout, même l'horreur, tourne aux enchantements,
Je guette, obéissant à mes humeurs fatales,
Des êtres singuliers, décrépits et charmants.
Ces monstres disloqués ...
...
Monstres brisés, bossusOu tordus...
...
Ils rampent, flagellés1 par les bises2 iniques3,
Frémissant au fracas roulant des omnibus,
Et serrant sur leur flanc, ainsi que des reliques,
Un petit sac brodé de fleurs ou de rébus ;
Ils trottent, tout pareils à des marionnettes ;
Se traînent, comme font les animaux blessés,
Ou dansent, sans vouloir danser, pauvres sonnettes
Où se pend un Démon sans pitié ! Tout cassés
Qu'ils sont, ils ont des yeux perçants comme une vrille,
Luisants comme ces trous où l'eau dort dans la nuit ;
Ils ont les yeux divins de la petite fille
Qui s'étonne et qui rit à tout ce qui reluit.
Charles Baudelaire, ...
(extrait), in "Tableaux parisiens", Les Fleurs du Mal, 1857.1. Flageller : fouetter.
2. Bise : vent sec et froid.
3. Inique : injuste, méchant.
1. Comment comprenez-vous le tableau de Gustav Klimt ?
2. a. Le livre de Daniel Pennac commence par cet extrait. Expliquez ce début. Qui parle à qui et pourquoi ?
b. Commentez l'illustration de la couverture du livre.
c. De quoi le narrateur peut-il bien parler dans ce "journal", selon vous ?
Dans Journal d'un corps, D. Pennac écrit : "Plus on l'analyse, ce corps moderne, plus on l'exhibe, moins il existe. Annulé, à proportion inverse de son exposition."
1. Reformulez simplement cette opinion.
2. Vous paraît-elle juste ?
1. Body art : Le Body Art, ou "art corporel", est un mouvement d'avant-garde dans lequel le corps de l'artiste devient le support de l'oeuvre.
Gustav Klimt, Les trois âges de la femme, 1905.
Le 3 août 2010
Ma chère Lison,
Te voilà revenue de mon enterrement, rentrée chez toi, tristounette forcément, mais Paris t'attend, tes amis, ton atelier, quelques toiles en souffrance, tes projets nombreux, dont celui de ton décor pour l'Opéra, tes fureurs politiques, l'avenir des jumelles, la vie, ta vie. Surprise, à ton arrivée une lettre de maître R. t'annonce en termes notariaux qu'il détient par-devers lui un paquet de ton père à toi destiné. Bigre, un cadeau post mortem du papa ! Tu y cours, bien sûr. Et c'est un drôle de présent que te remet le notaire : rien de moins que mon corps ! Non pas mon corps en chair et en os, mais le journal que j'en ai tenu en douce ma vie durant. (Seule ta mère savait, ces derniers temps.) [...]
Pas un journal intime, ma fille, tu connais ma prévention contre la recension de nos fluctuants états d'âme. Tu n'y trouveras rien non plus sur ma vie professionnelle, mes opinions, mes conférences, ou ce qu'Étienne appelait pompeusement mes "combats", rien sur le père social et rien sur le monde tel qu'il va. Non, Lison, le journal de mon seul corps, réellement. Tu en seras d'autant plus surprise que je n'étais pas un père très "physique". Je ne pense pas que mes enfants et mes petits-enfants m'aient jamais vu nu, assez rarement en maillot de bain, et jamais ils ne m'ont surpris roulant des biceps devant un miroir. Je ne pense pas non plus, hélas, avoir été prodigue en câlins. [...] Le corps n'était pas un sujet de conversation entre nous et je vous ai laissés, Bruno et toi, vous débrouiller seuls avec l'évolution du vôtre. N'y vois pas l'effet d'une indifférence ou d'une pudeur particulières ; né en 1923, j'étais tout bêtement un bourgeois de mon temps, de ceux qui utilisent encore le point-virgule et qui n'arrivent jamais au petit déjeuner en pyjama, mais douchés, rasés de frais, et dûment corsetés dans leur costume du jour. Le corps est une invention de votre génération, Lison. Du moins quant à l'usage qu'on en fait et au spectacle qu'on en donne. Mais pour ce qui est des rapports que notre esprit entretient avec lui en tant que sac à surprises et pompe à déjections, le silence est aujourd'hui aussi épais qu'il l'était de mon temps. Si on y regardait de près on constaterait qu'il n'y a pas plus pudiques que les acteurs pornos les plus déculottés ou les artistes du body art1 les mieux décortiqués. Quant aux médecins (à quand remonte ta dernière auscultation ?), ceux d'aujourd'hui, le corps, c'est bien simple, ils ne le touchent plus. Ils n'en ont, eux, que pour le puzzle cellulaire, le corps radiographié, échographié, scanné, analysé, le corps biologique, génétique, moléculaire, la fabrique d'anticorps. Veux-tu que je te dise ? Plus on l'analyse, ce corps moderne, plus on l'exhibe, moins il existe. Annulé, à proportion inverse de son exposition.Daniel Pennac, Journal d'un corps, 2012.
Que nous dit Aimée Mullins sur le handicap ?
1. Indiquez sur une échelle allant du plus 'naturel' au plus 'artificiel' les différentes formes d'humanité évoquées dans le document A.
2. Que nous disent ces documents sur la façon dont on peut, aujourd'hui ou demain, pallier aux limites du corps humain ?
Organisez, par groupes de trois, une table ronde. L'un des étudiants sera l'animateur, les autres représenteront chacun l'un des auteurs de ces documents. Cette table ronde comportera une brève introduction, trois points, une conclusion.
Selon vous, doit-on fixer des limites aux modifications qu'on peut apporter au corps humain ?
Qu'est-ce qui distingue les lunettes inventées en Italie au Moyen Âge et perfectionnées depuis, et ces lentilles qu'on nous annonce comme permettant de zoomer sur les objets qu'on regarde ? Les premières pallient des déficiences d'un corps qui vieillit, ou permettent de retrouver des capacités qui sont jugées comme étant dans la norme de l'espèce humaine. Les secondes apportent de nouvelles capacités aux personnes qui les chaussent, les rendant différentes de la majorité de leurs contemporains. Les premières réparent, les secondes augmentent. [...]
Ce débat entre ce qui relève de la réparation et ce qui procède de l'augmentation peut prendre une tournure plus philosophique, entre ce qui serait acceptable ou pas, à chaque fois au nom de principes de nature différente, scientifiques, philosophiques, éthiques ou religieux, qu'il n'est pas toujours immédiat d'identifier dans les postures. D'un côté les bioconservateurs , et de l'autres les biolibéraux , pourrait-on dire. [...]
Avec en fond la question des chercheurs Roache et Clarke : "Si on accepte les médicaments pour se guérir et les technologies pour accroître notre bien-être, pourquoi refuser d'augmenter nos capacités ?"Mais Homme réparé ou Homme augmenté ne sont pas les deux seuls termes de l'alternative proposée aux humains aujourd'hui. Nos systèmes de santé occidentaux sont fondés sur une médecine réparatrice, mais leur modèle économique contesté pourrait bien redonner toute sa place à une médecine préventive. Ils seraient aidés en cela par une batterie de capteurs que chacun pourrait porter, afin, pour commencer, de mieux se connaître, et de pouvoir être alerté avant de tomber malade grâce à l'analyse de ses données consolidées avec celles des autres utilisateurs. C'est là un scénario qui se précise de plus en plus, avec la culture de la mesure de soi, et grâce à la multiplication des appareils que l'on porte sur soi (montres tensiomètre...). Et quand ces capteurs sont intimement liés à nos vêtements, on parle d'Homme instrumenté. Équipé de son téléphone mobile, l'Homme n'a pas besoin de lunettes de réalité augmentée pour déjà accroître sa connaissance du monde. L'Homme connecté est en permanence à deux doigts des bases de connaissances : il accède à des savoirs qu'il n'a plus besoin d'apprendre ou de mémoriser. Quand il se fait traduire un texte, quand il choisit la meilleure route pour éviter des ralentissements, quand il est guidé par le choix de ses amis, il augmente ses capacités intellectuelles et ses interactions sociales. Demain, en accédant aux capteurs de la ville sensible, il élargira encore plus son champ d'observation. Il aura externalisé à la fois sa mémoire et sa perception.
L'Homme amélioré est un être qui n'est plus seulement instrumenté pour se connaître, ou connecté pour mieux connaître, mais qui est équipé pour dépasser son stade normal de l'évolution. L'amélioration peut être temporaire (dispositif externe) ou définitive (manipulation génétique...).
Ultimes étapes avant l'homo silicium, l'Homme hybridé possède un corps qui n'est plus entièrement naturel, avec des parts mécaniques, des sens nouveaux, ou même des fonctionnalités nouvelles. À l'extrême, il peut être débiologisé et être un Homme fabriqué, présent dans un corps totalement artificiel, ou même de manière ultime complètement décorporéisé et présent uniquement dans les réseaux.
Les Cahiers de Veille de la Fondation Télécom, juin 2015.
Jon Favreau, Iron Man, 2008, de 14:20 à 40:50.
Pourquoi, selon vous, le tatouage est-il aussi populaire aujourd'hui ?
Proposez une synthèse en vous appuyant sur ces deux documents.
On attend : une brève introduction, un développement structuré en paragraphes, une brève conclusion.
Non, le tatouage ne se résume pas à ce fulgurant phénomène de mode qui, durant les trois dernières décennies, a conquis près de 20% des Américains et un Français sur dix ! Comme le appelle aujourd'hui le Quai Branly, il s'agit d'une pratique millénaire et universelle. Difficile de dire à quand elle remonte exactement, mais les archéologues en ont trouvé la trace sur tous les continents, de la Sibérie au Pérou, de la Polynésie à l'Arctique. Le plus vieux tatoué connu s'appelle Ötzi. Conservé dans la glace des Alpes pendant quatre millénaires, son corps a révélé de peines marques sur les zones souffrant d'arthrose. Le tatouage, ici, aurait été pratiqué à des fins magico-thérapeutiques, mais il pouvait alors aussi bien être réalisé lors de rites de passage ou dans le cadre de coutumes religieuses. Cet usage païen est frappé d'interdit par l'Eglise dès le début du Moyen Age et disparaît d'Occident jusqu'à ce que les explorateurs européens ne le redécouvre... lors de leurs expéditions, à partir du XVIIe siècle. On doit ainsi au navigateur James Cook le terme "tattow", "tatau" en tahitien, qu'il découvre lors d'un voyage dans l'île polynésienne en 1759. Dès lors, les marins vont ramener à même la peau les témoignages de cette pratique ancestrale et la réintroduire dans leur pays d'origine.
Passage obligé dans la marine, largement répandu dans l'armée, le tatouage a également été utilisé pour marquer à jamais l'épiderme des esclaves, bagnards, prisonniers de camps, taulards ou prostituées. Et cette image très négative va longtemps lui coller à la peau. [...] Subversif, sulfureux, le tatouage devient petit à petit l'emblème d'une contre-culture aux États-Unis, qui dépasse largement le champ des taulards et de l'armée. Il accompagne le mouvement pacifiste et hippie, la libération des femmes, qui s'y mettent franchement à la manière d'une Janis Joplin tatouée par Lyle Tuttle. [...]
Se faire tatouer, c'est dévoiler une partie de soi, affirmer et afficher son identité. C'est aussi un acte radical, sans retour en arrière possible ; un engagement à vie. Pour les "porteurs d'encre", comme les nomme le sociologue Elise Müller, il s'agit souvent de s'approprier son corps et de l'inscrire dans une certaine permanence à l'heure eu tout se consomme et se jette à une vitesse vertigineuse... Dans l'intimité du studio, des liens, indélébiles eux aussi, se créent entre tatoueurs et tatoués, parmi lesquels on trouve de véritables collectionneurs près à attendre des années avant de pouvoir passer entre les mains de leur idole. L'expérience peut s'avérer bouleversante. Tatouée intégralement par Shinge, véritable légende vivante dans le domaine, Uki Yoko raconte ainsi, dans La Voie de l'encre (film diffusé au Quai Branly): "Mon tatoueur m'a révélé des choses sur ma personnalité. Désormais, je me sens plus libre de vivre selon mes propres règles."
Au quotidien elle dissimule ses tatouages sous des vêtements amples et porte une perruque car au Japon le tatouage reste très mal vu et c'est sa nature secrète qui lui confère sa beauté. Certains tatoués, au contraire, se mettent en scène dans des performances spectaculaires, n'hésitant pas à recouvrir leur visage peur aller au bout de leur personnage.
Daphné Bétard, "Le tatouage dans la peau", Beaux-Arts magazine, juillet 2014.
Le musée du Quai Branly est consacré aux arts et civilisations d'Afrique, d'Asie, d'Océanie et des Amériques.
Affiche de l'exposition 'Tatoueurs, tatoués', du 6 mai 2014 au 18 octobre 2015
Le sport produit-il un corps naturel ou artificiel ?
1. Quel est le point de vue défendu par cet auteur sur le dopage ?
2. Quels arguments utilise-t-il pour justifier son point de vue ? Résumez-les.
3. Quelles questions pose-t-il ?
Selon vous, est-on "propriétaire de son corps" ?
Le constat selon lequel le dopage met en péril la santé des sportifs ne doit pas masquer le fait que la haute compétition sollicite le corps jusqu'au dépassement de ses limites. Dopé ou pas, franchir en bicyclette un col de première catégorie revient à mettre son cœur à dure épreuve. En gravir plusieurs dans la journée ne peut qu'être dévastateur pour la santé. Et renouveler plusieurs jours de suite cet exploit (ce qui est sans doute impossible sans "rééquilibrage hormonal"), confine à une manière de suicide. Dans ces conditions d'extrême sollicitation des corps, le dopage paraît inévitable. Ainsi, comment ne pas se montrer incrédule quand, d'une part, on annonce une diminution du nombre des contrôlés positifs et quand, d'autre part, les moyennes de courses s'élèvent sans cesse, au point que tout le peloton réussit aujourd'hui l'ascension de l'Alpe d'Huez dans des meilleurs temps que ceux de Fausto Coppi ou Eddy Merckx1 ?
Mais, par-delà la dénonciation des hypocrisies, les évolutions actuelles du sport de haute compétition soulèvent deux types de questions. Les premières concernent d'abord le statut de champion : naguère encore héros, il est devenu une star. Cette mutation a en partie libéré le champion d'exigences morales qui constituaient précédemment des contraintes incontournables. Mêlé à des affaires de dopage ou de corruption, non seulement il ne perd pas toujours son crédit mais il peut parfois se voir conforté dans son exceptionnalité. [...]
Regarder les cyclistes s'échiner des journées durant sur les pentes des Alpes ou des Pyrénées incite les spectateurs à une dangereuse indulgence, qui va pour beaucoup jusqu'à pardonner l'emploi de quelques adjuvants pour accomplir une épreuve perçue à juste titre comme surhumaine. [...]Le deuxième type de questionnement revêt une dimension morale et concerne les limites à poser ou pas aux prises de risques consenties par les sportifs. Jusqu'où peut-on jouer avec sa santé ? Les sportifs ne dépassent-ils pas les bornes du supportable ? Ce type d'interrogations n'est vraiment pertinent qu'à condition que le spectateur consente à cesser de vouloir un spectacle toujours plus extraordinaire, tout en s'étonnant des dégâts occasionnés par ce caractère extrême des compétitions. Tant que l'on estimera que c'est au sportif qu'il revient de décider qu'il est propriétaire de son corps, il faudra bien admettre que la violence, certes la moins visible mais pourtant la plus déterminante, est celle des spectateurs. Changer, cela supposerait d'accepter l'organisation de compétitions présentant des performances moindres, avec par exemple pour le Tour de France un calendrier qui ne prévoirait plus une étape de trois cents kilomètres par jour mais une étape de cent cinquante kilomètres tous les deux jours. Les impératifs médiatiques ne valent que si le public les ratifie.
P. Duret, Cahiers français, n° 320 (mai-juin 2004), Sport et société , "Compétitions et dopage". © La Documentation française.
1. Champions cyclistes héros du tour de France
1. Du début à 40 min : Comment évolue le corps du sportif d'après Million Dollar Baby ?
2. De 1 h 26 min à 1 h 33 min (6 minutes) : Comment le moment de la chute est-il filmé ? 1'43'23 et de 1'49'06 à 2'05'26 :
3. De 1 h 33 min à 1 h 43 min et de 1 h 48 min à 2 h 08 min (30 minutes) : Comment évolue le corps de Maggie ?
4. Selon vous, Frank a-t-il eu raison d'agir comme il l'a fait ? Pourquoi ?
Clint Eastwood, Million Dollar Baby, 2005.
Vous proposerez un plan de synthèse détaillé (avec des références précises et explicites à chaque document) et organisé (avec parties et sous-parties).
La décision est inédite. Le tribunal de grande instance (TGI) de Tours a ordonné, le 20 août, la rectification de l'état civil d'une personne née avec une "ambiguïté sexuelle" et la substitution de la mention de "sexe masculin" par la mention "sexe neutre". "C'est la première fois qu'on reconnaît en Europe l'appartenance d'un adulte à un sexe autre que masculin ou féminin", insiste Benjamin Moron-Puech, auteur d'un mémoire Les Intersexuels et le droit (université Panthéon-Assas).
Cela n'a pas échappé au parquet, qui a fait appel d'une décision qu'il estime relever d'un "débat de société générant la reconnaissance d'un troisième genre". "Nous ne sommes pas dans le rôle du législateur pour créer la loi", a observé le vice-procureur de la République de Tours, Joël Patard. "C'est une décision importante, analyse M. Moron-Puech. Et le parquet estime souhaitable que d'autres juridictions, et sans doute à terme la Cour de cassation, se prononcent sur cette question afin de dégager une solution claire et faisant autorité."
D'ores et déjà, Vincent Guillot est "heureux". Celui qui a cofondé, en 2004, l'Organisation internationale des intersexués (OII), voit dans cette remise en cause de la binarité sexuelle la "suppression du principal prétexte aux mutilations des enfants en bas âge".
"Des traitements irréversibles"
Car c'est avant tout cette revendication que portent les personnes intersexuées, qui représenteraient 1,7 % de la population ou encore environ 200 nouveau-nés par an en France. L'intersexualité renvoie à une variation de l'aspect des organes génitaux externes et internes souvent corrigée par un traitement hormonal ou une chirurgie génitale à la naissance, dans le but d'assigner à l'enfant un sexe féminin ou masculin.
"Dès les années 1940, les traitements précoces tels que la réduction clitoridienne ou la vaginoplastie ont commencé à se systématiser, rappelle Cynthia Kraus, philosophe à l'université de Lausanne, en Suisse. Certains cliniciens continuent de justifier ces traitements irréversibles pour assurer le prétendu bon développement psychologique et sexuel de l'enfant. En réalité, ils privilégient l'apparence des organes génitaux au détriment de l'intégrité corporelle et du droit à l'autodétermination, alors même qu'on ne sait pas comment la morphologie de l'enfant va évoluer ni à quel sexe il va s'identifier."
En mai 2015, le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Nils Muiznieks, a présenté un rapport sur le sujet dans lequel il évoque ces "conséquences tout au long de la vie, incluant : la stérilisation, des lésions graves, des infections de l'appareil urinaire, une réduction ou la perte complète des sensations sexuelles, la suppression des hormones naturelles, la dépendance aux médicaments et un sentiment profond de la violation de leur personne".
D'après Vincent Guillot, seules deux procédures au pénal contre des médecins seraient en cours en France. "Le combat des intersexes est récent, rappelle Joëlle Wiels, généticienne au CNRS et coauteurs de Mon corps a-t-il un sexe ? (Editions La Découverte, 2015). L'intersexuation a longtemps été taboue, considérée comme une maladie."
Le cas des transsexuels
Les malentendus ne sont pas tous dissipés. Sur Twitter, La Manif pour tous a vu dans la décision du TGI de Tours l'œuvre de "l'idéologie du gender" (du genre). Le directeur de l'hebdomadaire Valeurs actuelles, Yves de Kerdrel, parle, lui, du "début d'un effondrement des piliers de notre civilisation".
Cette décision a-t-elle ouvert une boîte de Pandore ? De l'avis de Benjamin Moron-Puech, "les juges qui seront prochainement saisis de cette affaire s'attacheront sans doute à circonscrire très nettement leur décision aux seules personnes intersexuées". Peut-on imaginer, par exemple, que les personnes transsexuelles puissent à l'avenir se revendiquer elles aussi d'un sexe neutre ? Aujourd'hui, elles peuvent seulement modifier le sexe mentionné à l'état civil si elles attestent d'une transition "irréversible", c'est-à-dire d'une stérilisation. Bien que l'ablation génitale ne soit pas obligatoire, les demandeurs doivent souvent se soumettre à des expertises attestant d'une opération chirurgicale de réassignation sexuelle.
"Biologiquement, les transsexuels n'ont rien à voir avec les personnes intersexuelles, tranche Joëlle Wiels. Mais, du point de vue de la reconnaissance des droits, il y a cet objectif commun de faire tomber la bicatégorisation mâle/femelle". A l'inter-LGBT (Interassociative lesbienne, gaie, bi et trans), Clémence Zamora-Cruz, chargée des questions trans, précise : "Des personnes peuvent réclamer un troisième genre, mais ce n'est pas une revendication globale des associations trans. A l'inter-LGBT, on pense que la personne doit pouvoir s'autodéterminer selon sa conviction intime."
Julia Pascual, "Sexe neutre : un nouveau genre ?", lemonde.fr, 14 octobre 2015.
Manifestations contre "le mariage pour tous", polémiques sur l'enseignement du genre à l'école, victoire de Conchita Wurst à l'Eurovision et loi australienne en faveur d'un sexe neutre... Plusieurs événements récents ont mis les questions de genre et de sexualités au centre du débat public. Avec une problématique récurrente : qu'est-ce qui relève du choix, qu'est-ce qui relève du déterminisme biologique dans nos pratiques et identités sexuelles ?
Aussi fondamentales paraissent-elles, ces problématiques sont en réalité récentes. Dans un article de 1981 intitulé "Histoire critique du mot hétérosexualité", Jean-Claude Féray souligne qu'il a fallu attendre 1869 pour que l'écrivain et essayiste hongrois Karl-Maria Kertbeny délimite pour la première fois une différence entre "l'homosexualité" et ce qu'il nomme la "normalsexualité" (qui deviendra l'hétérosexualité). L'hétérosexualité reste alors la seule forme normale, agissant comme un fantôme souverain, une injonction normative puissante mais jamais questionnée.
Le genre : entre injonctions et transformations
Alors que l'homosexualité s'est d'abord définie comme une pathologie, d'autres théoriciens comme Magnus Hirschfeld développent à son égard l'idée d'une "variance normale" de la sexualité. Mais un autre concept, en provenance des États-Unis, vient ébranler cette idée. Les recherches d'Alfred Charles Kinsey autour du concept de "bisexualité" (1948) poussent l'hétérosexualité à perdre son statut d'universalité pour devenir, théoriquement dans un premier temps, une pratique sexuelle parmi d'autres dans la mosaïque des sexualités. Aujourd'hui, la théorie queer permet de reformuler cette opposition. Dans son épistémologie du placard (1990), Eve Kosofsky Sedgwick montre ainsi que le "placard" qui symbolise la "honte" ou le "secret" de l'homosexualité socialement perçue comme anormale, dissimule une caractéristique plus large des identités sexuelles : entre homosexualité et hétérosexualité, entre masculin et féminin, les frontières et les hiérarchies parfois se dérobent. La "découverte" de la pluralité des formes de sexualité entraîne dans son sillage une série d'interrogations sur la notion d'identité de genre (masculinité/féminité) : comment s'émanciper des normes de genre ?
Popularisée par Anne Oakley en 1972 dans son livre Sex, Gender and Society, la notion de genre connaît en France deux grandes acceptions. La première permet d'insister, à la manière de Christine Delphy (L'Ennemi principal, 1998), sur la dimension matérielle des oppressions de genre et sur les hiérarchies qu'elles fabriquent. Le "patriarcat" crée des inégalités entre les femmes et les hommes, par exemple, dans le milieu domestique (80 % des tâches ménagères sont accomplies par les femmes) et professionnel (salaires féminins inférieurs de 25 %, en équivalent temps plein, en moyenne à ceux masculins). Une seconde tendance, inspirée par les théoriciennes queer Térésa de Lauretis et Judith Butler, permet d'appréhender la pluralité des identités de genre en s'intéressant, par exemple, à celles qui dépassent la binarité masculin/féminin, comme les drag-queens ou drag-kings. J. Butler en déduit que les identités de genre reposent en grande partie sur des "pratiques d'improvisation qui se déploient à l'intérieur d'une scène de contrainte" (2006). Le genre est précisément cela : la manière dont les individus composent avec les contraintes sociales et biologiques. La plupart acceptent d'appartenir soit au genre féminin soit au genre masculin, mais certains ne se reconnaissent ni dans l'un ni dans l'autre. Certain(e)s, comme Conchita Wurst, gagnante 2014 de l'Eurovision, veulent être les deux à la fois.
L'invention de la transidentité
D'autres identités sont possibles, au-delà des assignations de genre classiques (masculin/féminin). C'est dans cette perspective que se développent aujourd'hui les trans studies. Elles tentent de rompre avec la pathologisation des personnes trans. L'histoire des transidentités, restituée par Maxime Foerster (2012) ou Karine Espineira (2008), insiste alors sur les transidentités dans leurs diversités ainsi que sur leurs revendications. En France, par exemple, certains psychiatres et tribunaux considèrent encore le changement de genre comme une maladie mentale et demandent que les personnes trans soient stérilisées pour accorder un changement d'état civil. Mais des figures comme Thomas Beatie – un homme trans americain qui, ayant gardé ses organes reproducteurs, est tombé enceint – interrogent en retour ces normes juridiques. Aujourd'hui, ces multiples formes transidentitaires (hommes ou femme trans opéré(e)s, non opéré(e)s...) s'éloignent donc du modèle médical et psychiatrique du "transsexualisme" (cette maladie inventée par la psychiatrie en 1958) pour développer de nouveaux rapports aux genres et aux corps.
Les sciences naturelles ne sont pas en reste dans la reconnaissance d'une possibilité pour les individus d'inventer leur identité sexuelle. En neurobiologie, Catherine Vidal a montré que "chaque cerveau est différent, quel que soit le sexe" (2013). Les études de Priscille Touraille sur la taille des garçons et des filles (2008) soulignent également que les comportements culturels influencent de manière non négligeable notre apparence physique. À la suite d'Anne Fausto-Sterling (2012), il s'agit de considérer que la frontière entre les sexes est moins épaisse qu'il y paraît. Les recherches sur le monde animal y contribuent. Par exemple, Joan Roughgarden (2012) met en avant la pluralité des formes sexuées dans le règne animal. Au final, une lecture biologique ne dit rien d'autre que la pluralité et la contingence des caractéristiques sexuelles du vivant.
Arnaud Alessandrin, "Peut-on choisir son identité sexuelle ?", in Sciences Humaines, Les grandes questions de notre temps, n° 266, janvier 2015.
Passionné par le mélange des genres, de l'antiquité grecque aux photos de mode d'aujourd'hui, l'éditeur et écrivain Patrick Mauriès publie Androgynie, une image de mode et sa mémoire. Un beau livre, d'une érudition extraordinaire. Il s'en explique à L'Express diX.
D'où est venue l'envie de réaliser ce livre ?
Par curiosité. En 2013, j'ai constaté l'explosion du nombre de modèles androgynes, hommes comme femmes, dans les revues de mode anglo-saxonnes. J'ai cherché à comprendre d'où venait ce phénomène, pourquoi il advenait à ce moment-là, et ce qu'il disait de l'actualité.
Quel est le fruit de votre recherche ?
J'ai d'abord remarqué que notre époque faisait étrangement écho à la fin du XIXe siècle, elle aussi obsédée par le mélange des genres avec des artistes tels que Gustave Moreau, Oscar Wilde ou Joséphin Peladan... J'en suis venu à la conclusion que la figure de l'androgyne surgit en réaction aux grandes révolutions industrielles qui uniformisent le style et la pensée. Aujourd'hui, face à la mondialisation, l'avènement d'Internet et des réseaux sociaux, la singularité se réaffirme. Par ailleurs, le travail de philosophes français tels que Jacques Derrida, puis ceux d'universitaires américains comme Judith Butler avec les gender studies, ont infusé dans la culture populaire. La notion figée de genre masculin ou féminin a volé en éclat.
Pourtant, avec Mick Jagger, David Bowie ou les New York Dolls, les figures androgynes existent depuis des décennies dans la culture pop... La mode a-t-elle un train de retard ?
D'une certaine façon. Mais dans les années 1970, ces icônes musicales se mettaient en scène de façon théâtrale en créant des personnages de toutes pièces ; je pense notamment au Ziggy Stardust de David Bowie. Aujourd'hui, l'androgynie moderne, telle qu'on la découvre dans l'univers de la mode, mais aussi, plus simplement, dans les rues de Londres ou de New York, est devenue profondément naturaliste. La nouveauté est là. Ces jeunes gens ne mettent plus de maquillage et ne s'habillent plus de façon excentrique : ils sont tels qu'ils sont, homme et femme, et refusent de rentrer dans l'une de ces deux catégories.
Mais vous vous intéressez également aux grands invariants de l'androgynie...
En effet. Les deux grandes caractéristiques qui traversent l'histoire de l'Occident sont la blancheur de la peau et le culte de l'adolescence. De façon générale, la question de la vieillesse pose problème aux androgynes. Il semblerait que l'on ne puisse pas vieillir sans choisir de devenir pleinement homme ou femme. Par exemple, dans une nouvelle de Balzac intitulée Sarrasine, le héros tombe amoureux d'un jeune castrat qu'il retrouvera des années plus tard sous les traits d'un véritable monstre. Ce motif est courant dans l'histoire de l'art.
Que pensez-vous des tendances réactionnaires actuelles ? En avril, France 2 diffusait un documentaire sur les stages de "masculinité", visant à reviriliser les hommes.
Cette tendance existe. Mais comme vous le dites, c'est une simple réaction, qui est donc ponctuelle. Globalement, nous allons vers une pluralité des identités, qui existeront toutes sans s'exclure. Les androgynes, les transgenres, agenres... Socialement, ce qui a été acquis devrait le rester.
Pendant l'élection présidentielle de 2017, Nicolas Sarkozy avait dit d'Emmanuel Macron : "Il est un peu homme, un peu femme, c'est la mode du moment. Androgyne." Qu'en pensez-vous ?
La tendance actuelle est au dépassement des oppositions habituelles. Le "en même temps" d'Emmanuel Macron n'a jamais été autant dans l'air du temps, c'est indéniable.
Est-il possible, alors, d'être en même temps viril et androgyne ?
Bien sûr. Prenez Mick Jagger par exemple. Il joue magnifiquement avec les attributs de la féminité, dans ses poses, dans sa façon de danser, avec sa voix et ses costumes... Et pourtant, sur scène, il dégage une puissance et une férocité absolument démentes. Cet artiste est un ogre. C'est l'illustration même de la virilité androgyne. Non, l'un n'empêche pas l'autre.
Existe-t-il aujourd'hui des icônes androgynes comparables ?
Oui, mais on les trouve moins du côté de la culture populaire que du côté de la mode. Je pense notamment à Andreja Pejic, Irina Kravchenko, Oliverbizhan Azarmi et Leonardo Gaist... Ce sont tous des modèles, hommes et femmes, qui ont fait tomber des barrières. On les a vus porter des vêtements pour des défilés hommes et femmes.
En ce sens, peut-on dire que ce sont des modèles politiques ?
Ils sont les porte-voix d'une génération qui ne se sent ni tout à fait homme ni tout à fait femme. Après, bien sûr, les créateurs savent les mettre en scène.
Est-ce que l'androgynie change fondamentalement les rapports entre les hommes et les femmes ?
Non. Certains, à l'instar d'Eric Zemmour, affirment que la société se féminise. Pour ma part, j'estime que les hommes se sophistiquent. Mais je ne crois pas à la déchéance de la masculinité. Les aristocrates à la cour de Louis XIV, avec leur maquillage et leurs costumes, n'étaient pas forcément plus virils que les hommes d'aujourd'hui !
Quels attributs donner à la virilité ?
Les attributs habituels : la force, la paternité, l'autorité...
Angela Merkel manque-t-elle d'autorité ?
Ces clichés sont périmés. Je me réjouis de la mode androgyne et de la perméabilité générale des genres : l'ambiguïté a toujours été plus féconde et créative que la normalité.
Igor Hansen-Love, "L'androgyne est-il l'avenir de l'homme ?", L'Express, le 23/10/2017.