Objet d'étude : Le théâtre du XVIIe siècle au XXIe siècle
Problématique : George Dandin, comédie-ballet ou farce tragique ?
Support : Molière, George Dandin, éd. Livre de Poche.
Exposés : les retournements de situation ; George Dandin, soupirant ou tyran.
D'après les titres des pièces, quels sont les thèmes récurrents dans les pièces de Molière ?
1. Femmes du xviie siècle qui défendaient un idéal amoureux raffiné et un langage recherché.
2. Personne qui manifeste de l'aversion pour le genre humain.
1659 : Les Précieuses1 ridicules
1660 : Sganarelle ou le cocu imaginaire
1661 : L'École des maris
1661 : Dom Garcie de Navarre ou le Prince jaloux
1662 : L'École des femmes
1664 : Le Tartuffe
1665 : Dom Juan
1666 : Le Misanthrope2
1666 : Le Médecin malgré lui
1668 : George Dandin ou le Mari confondu
1668 : L'Avare
1669 : Monsieur de Pourceaugnac
1670 : Le Bourgeois Gentilhomme
1671 : Les Fourberies de Scapin
1672 : Les Femmes savantes
1673 : Le Malade imaginaire
Comparez les deux documents.
1. OEuvre littéraire qui raconte les amours des bergers et des bergères dans une campagne idéale (synonyme de pastorale).
2. De "idylle", petit poème à sujet pastoral et amoureux.
3. Art de composer en superposant différentes mélodies.
La pièce a été représentée par Molière et sa troupe dans le cadre du Grand Divertissement royal de Versailles donné dans le parc du château le 18 juillet 1668. La comédie s'insérait au coeur d'une bergerie1 chantée et dansée, dont les vers étaient de Molière et la musique de Lulli. [...]
Depuis la fin du XVIe s., un des divertissements préférés des rois et des grands a été le ballet. Il s'agit d'un spectacle complexe et onéreux, que les princes et les nobles s'offrent à eux-mêmes. [...]
Il y a une vive opposition entre cet univers "vraisemblable" du village de Dandin et le monde idyllique2 de la bergerie qui doublait aux fêtes de Versailles la représentation de la comédie. [...]
L'intrigue de la pastorale1-cadre (deux bergers sont rebutés ; ils tentent de se donner la mort ; ils sont secourus par des mariniers et enfin bien reçus de celles qu'ils aiment) s'accommodait parfaitement d'un contrepoint3 comique.
Préface de Jacques Morel à l'édition Livre de Poche de George Dandin.
Damien Chazelle, La La Land, 2016, du début à 4'50.
1. Observez la mise en scène de Catherine Hiegel pour la Comédie Française, 1999, de 14'20 à 17'15. Comment le metteur en scène a-t-il choisi de montrer M. et Mme de Sotenville ?
2. Quels éléments de comique apparaissent dans ce dialogue ?
1. Comment ce texte fait-il la satire de la noblesse de province ?
2. George Dandin vous paraît-il comique ou pathétique ?
3. Qu'est-ce qui rend ce dialogue impossible ?
1. Quels sont les noms des personnages principaux ?
2. Que disent ces noms et prénoms ?
Monsieur et Madame de Sotenville, George Dandin.
Monsieur de Sotenville
Qu'est-ce, mon gendre ? vous me paraissez tout troublé.
George Dandin
Aussi en ai-je du sujet, et…
Madame de Sotenville
Mon Dieu ! notre gendre, que vous avez peu de civilité de ne pas saluer les gens quand vous les approchez !
George Dandin
Ma foi ! ma belle-mère, c'est que j'ai d'autres choses en tête, et…
Madame de Sotenville
Encore ! Est-il possible, notre gendre, que vous sachiez si peu votre monde, et qu'il n'y ait pas moyen de vous instruire de la manière qu'il faut vivre parmi les personnes de qualité ?
George Dandin
Comment ?
Madame de Sotenville
Ne vous déferez-vous jamais avec moi de la familiarité de ce mot de "ma belle-mère" , et ne sauriez-vous vous accoutumer à me dire "Madame" ?
George Dandin
Parbleu ! si vous m'appelez votre gendre, il me semble que je puis vous appeler ma belle-mère.
Madame de Sotenville
Il y a fort à dire, et les choses ne sont pas égales. Apprenez, s'il vous plaît, que ce n'est pas à vous à vous servir de ce mot-là avec une personne de ma condition ; que tout notre gendre que vous soyez, il y a grande différence de vous à nous, et que vous devez vous connaître.
Monsieur de Sotenville
C'en est assez, mamour, laissons cela.
Madame de Sotenville
Mon Dieu ! Monsieur de Sotenville, vous avez des indulgences qui n'appartiennent qu'à vous, et vous ne savez pas vous faire rendre par les gens ce qui vous est dû.
Monsieur de Sotenville
Corbleu ! pardonnez-moi, on ne peut point me faire de leçons là-dessus, et j'ai su montrer en ma vie, par vingt actions de vigueur, que je ne suis point homme à démordre jamais d'un pouce de mes prétentions. Mais il suffit de lui avoir donné un petit avertissement. Sachons un peu, mon gendre, ce que vous avez dans l'esprit.
George Dandin
Puisqu'il faut donc parler catégoriquement, je vous dirai, Monsieur de Sotenville, que j'ai lieu de…
Monsieur de Sotenville
Doucement, mon gendre. Apprenez qu'il n'est pas respectueux d'appeler les gens par leur nom, et qu'à ceux qui sont au-dessus de nous il faut dire "Monsieur" tout court.
George Dandin
Hé bien ! Monsieur tout court, et non plus Monsieur de Sotenville, j'ai à vous dire que ma femme me donne…
Monsieur de Sotenville
Tout beau ! Apprenez aussi que vous ne devez pas dire "ma femme" , quand vous parlez de notre fille.
George Dandin
J'enrage. Comment ? ma femme n'est pas ma femme ?
Madame de Sotenville
Oui, notre gendre, elle est votre femme ; mais il ne vous est pas permis de l'appeler ainsi, et c'est tout ce que vous pourriez faire, si vous aviez épousé une de vos pareilles.
George Dandin
Ah ! George Dandin, où t'es-tu fourré ? Eh ! de grâce, mettez, pour un moment, votre gentilhommerie à côté, et souffrez que je vous parle maintenant comme je pourrai.
Molière, George Dandin, I, 4, 1668.
Choisissez l'un des deux passages suivants : "Pour moi... mourir si jeune", "M'avez-vous... à vos volontés.
Ajoutez des didascalies de façon à indiquer exactement au comédien comment prononcer ces paroles : le débit, le volume, les pauses, les accents...
Angélique
Pour moi, je vous déclare que mon dessein n'est pas de renoncer au monde, et de m'enterrer toute vive dans un mari. Comment ? parce qu'un homme s'avise de nous épouser, il faut d'abord que toutes choses soient finies pour nous, et que nous rompions tout commerce avec les vivants ? C'est une chose merveilleuse que cette tyrannie de Messieurs les maris, et je les trouve bons de vouloir qu'on soit morte à tous les divertissements, et qu'on ne vive que pour eux. Je me moque de cela, et ne veux point mourir si jeune.
George Dandin
C'est ainsi que vous satisfaites aux engagements de la foi que vous m'avez donnée publiquement ?
Angélique
Moi ? je ne vous l'ai point donnée de bon cœur, et vous me l'avez arrachée. M'avez-vous, avant le mariage, demandé mon consentement, et si je voulais bien de vous ? Vous n'avez consulté, pour cela, que mon père et ma mère ; ce sont eux proprement qui vous ont épousé, et c'est pourquoi vous ferez bien de vous plaindre toujours à eux des torts que l'on pourra vous faire. Pour moi, qui ne vous ai point dit de vous marier avec moi, et que vous avez prise sans consulter mes sentiments, je prétends n'être point obligée à me soumettre en esclave à vos volontés ; et je veux jouir, s'il vous plaît, de quelque nombre de beaux jours que m'offre la jeunesse, prendre les douces libertés que l'âge me permet, voir un peu le beau monde, et goûter le plaisir de ouïr dire des douceurs. Préparez-vous-y, pour votre punition, et rendez grâces au Ciel de ce que je ne suis pas capable de quelque chose de pis.
George Dandin
Oui ! c'est ainsi que vous le prenez ? Je suis votre mari, et je vous dis que je n'entends pas cela.
Angélique
Moi je suis votre femme, et je vous dis que je l'entends.
Molière, George Dandin, II, 2, 1668.
Comparez les deux interprétations d'Angélique.
![]() George Dandin, mise en scène par Philippe Soupault pour la Chaîne Parisienne, 1953, rediffusé sur France Culture le 29/04/2020, de 22'25 à 23'45. |
![]() George Dandin, mise en scène de Catherine Hiegel pour la Comédie Française, 1999, de 42'25 à 44'17. |
Imaginez un décor qui montre clairement la situation des personnages.
Que nous montre cette scénographie sur la condition des femmes ?
Scénographie de Raymond Sarti pour la mise en scène de François Rancillac pour l'ACB (Bar-le-Duc), 1996.
1. Remplissez le tableau suivant en indiquant les personnages présents dans chaque scène.
2. Montrez que les trois actes reposent sur une structure répétitive.
3. Quel est le seul personnage qui monologue ? Pourquoi ?
4. Où se trouve George Dandin le plus souvent ? Qu'est-ce que cela montre ?
Acte | I | II | III | ||||||||||||||||||||
Scène | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 |
George Dandin | |||||||||||||||||||||||
Angélique | |||||||||||||||||||||||
M. de Sotenville | |||||||||||||||||||||||
Mme de Sotenville | |||||||||||||||||||||||
Clitandre | |||||||||||||||||||||||
Claudine | |||||||||||||||||||||||
Lubin | |||||||||||||||||||||||
Colin |
1. Quelle nouvelle dimension du personnage d'Angélique apparaît dans cette scène ?
2. Selon vous, George Dandin a-t-il raison d'agir comme il le fait dans cette scène ?
Comparez la fin de cet extrait et la fin de la pièce. Que remarquez-vous ?
Après la scène 8 de l'acte III, ajoutez une scène qui conclue la pièce comme une véritable comédie.
Jouez/préparez une lecture expressive des scènes 8 et 9 de l'acte III.
Angélique
De grâce, laissez-moi vous dire. Je vous demande un moment d'audience.
George Dandin
Hé bien, quoi ?
Angélique
Il est vrai que j'ai failli, je vous l'avoue encore une fois, que votre ressentiment est juste ; que j'ai pris le temps de sortir pendant que vous dormiez, et que cette sortie est un rendez-vous que j'avais donné à la personne que vous dites. Mais enfin ce sont des actions que vous devez pardonner à mon âge ; des emportements de jeune personne qui n'a encore rien vu, et ne fait que d'entrer au monde ; des libertés où l'on s'abandonne sans y penser de mal, et qui sans doute dans le fond n'ont rien de…
George Dandin
Oui : vous le dites, et ce sont de ces choses qui ont besoin qu'on les croie pieusement.
Angélique
Je ne veux point m'excuser par là d'être coupable envers vous, et je vous prie seulement d'oublier une offense dont je vous demande pardon de tout mon cœur, et de m'épargner en cette rencontre le déplaisir que me pourraient causer les reproches fâcheux de mon père et de ma mère. Si vous m'accordez généreusement la grâce que je vous demande, ce procédé obligeant, cette bonté que vous me ferez voir, me gagnera entièrement. Elle touchera tout à fait mon cœur, et y fera naître pour vous ce que tout le pouvoir de mes parents et les liens du mariage n'avaient pu y jeter. En un mot, elle sera cause que je renoncerai à toutes les galanteries, et n'aurai de l'attachement que pour vous. Oui, je vous donne ma parole que vous m'allez voir désormais la meilleure femme du monde, et que je vous témoignerai tant d'amitié, tant d'amitié, que vous en serez satisfait.
George Dandin
Ah ! crocodile, qui flatte les gens pour les étrangler.
Angélique
Accordez-moi cette faveur.
George Dandin
Point d'affaires. Je suis inexorable.
Angélique
Montrez-vous généreux.
George Dandin
Non.
Angélique
De grâce !
George Dandin
Point.
Angélique
Je vous en conjure de tout mon cœur.
George Dandin
Non, non, non. Je veux qu'on soit détrompé de vous, et que votre confusion éclate.
Angélique
Hé bien ! si vous me réduisez au désespoir, je vous avertis qu'une femme en cet état est capable de tout, et que je ferai quelque chose ici dont vous vous repentirez.
George Dandin
Et que ferez-vous, s'il vous plaît ?
Angélique
Mon cœur se portera jusqu'aux extrêmes résolutions, et de ce couteau que voici je me tuerai sur la place.
Molière, George Dandin, III, 6, 1668.
Soient les propositions subordonnées dans les deux phrases suivantes. Essayez de les remplacer par un autre mot ou groupe de mots. Sont-elles équivalentes ?
a. "Je veux qu'on soit détrompé de vous"
b. "je vous prie seulement d'oublier une offense dont je vous demande pardon de tout mon cœur"
1. Trouvez les propositions subordonnées dans ces phrases. S'agit-il de relatives ou de conjonctives ?
a. "ce sont des actions que vous devez pardonner à mon âge"
b. "[ce sont] des libertés où l'on s'abandonne sans y penser de mal"
c. "je vous donne ma parole que vous m'allez voir désormais la meilleure femme du monde"
d. "si vous me réduisez au désespoir, je vous avertis qu'une femme en cet état est capable de tout"
2. Trouvez les subordonnées dans les phrases suivantes et identifiez-les.
a. "[Il est vrai] que j'ai pris le temps de sortir pendant que vous dormiez"
b. "Si vous m'accordez généreusement la grâce que je vous demande, ce procédé obligeant, cette bonté que vous me ferez voir, me gagnera entièrement."
À propos de George Dandin, le metteur en scène Jean-Paul Roussillon affirme : "Il est très difficile [...] de rendre la chose comique." ("La Comédie Française, 1680 - 1970", une émission diffusée pour la première fois le 9 octobre 1970, France Culture).
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