On distinguera les dictées 'pour apprendre' et les
dictées 'pour évaluer'.
- dictée négociée (chaque élève rédige son texte
individuellement ; une confrontation a ensuite lieu et les
élèves rédigent une seconde version négociée ) ;
- dictée aidée (des affiches ou des fiches réalisées au
préalable par les élèves ou le droit de poser des questions
à l'enseignant et/ou au groupe) ;
- dictée préparée (le texte a été vu au préalable et
discuté entre élèves et/ou avec l'enseignant) ;
- auto-dictée (le texte a été appris par coeur et est
restitué tel quel)...
I
En ce moment, une main blanche et délicate fit
remonter la partie inférieure d'une des croisées du
troisième étage. La figure d'une jeune fille, fraîche
comme une de ces fleurs blanches qui fleurissent au sein
des eaux, se montra couronnée d'une coiffe en mousseline
froissée qui donnait à sa tête un air d'innocence
admirable. Quoique couverts d'une étoffe brune, on
pouvait apercevoir son cou et ses épaules, grâce à de
légers interstices ménagés par les mouvements du sommeil.
Pareille à ces fleurs de jour qui n'ont pas encore au
matin déplié leur tunique roulée par le froid des nuits,
la jeune fille, à peine éveillée, laissa errer ses yeux
bleus sur les toits voisins et regarda le ciel ; puis,
par une sorte d'habitude, elle les baissa sur les sombres
régions de la rue, où ils rencontrèrent aussitôt ceux de
son adorateur.
Brevet 2017
De temps en temps, je m'arrête, je tourne la tête et
je regarde vers le bas de la rue où Paris s'entasse: des
foyers éclatants et des taches de ténèbres piquetées de
points d'or. Des flammes blanches ou rouges flambent d'en
bas comme d'une vallée nocturne où s'est arrêtée la
caravane des nomades. Et le bruit : bruit de fleuve ou de
foule. Mais les flammes sont fausses et froides comme
celles de l'enfer. En bas, dans un de ces parages sombres
est ma rue du Dragon, mon hôtel du Dragon. Quel ordre
sournois, le soir déjà lointain de ma première arrivée,
m'a fait mystérieusement choisir cette rue, cet hôtel au
nom dévorant et enflammé ?
Il me serait facile, d'ici, d'imaginer le monstre aux
écailles de feu.
Jean Giono, Les Vraies
Richesses, 1936
Brevet 2016
Mais il est six heures du soir. La nuit vous entre
dans les yeux. On n'a plus que ses mains nues, que toute
sa peau offerte à la boue. Elle vous effleure les doigts,
légèrement et s'évade. Elle effleure les marches
rocheuses, les marches solides qui portent bien les pas.
Elle revient, plus hardie, et claque sur les paumes
tendues. Elle baigne les marches […], les engloutit :
brusquement, on la sent qui se roule autour des
chevilles… Son étreinte d'abord n'est que lourdeur
inerte. On lutte contre elle, et on lui échappe. C'est
pénible, cela essouffle ; mais on lui arrache ses jambes,
pas à pas…
Maurice Genevoix, "La Boue",
Ceux de 14, 1916.
Brevet 2015
Il n'y avait rien d'autre sur la terre, rien, ni
personne. Ils étaient nés du désert, aucun autre chemin
ne pouvait les conduire. Ils ne disaient rien. Ils ne
voulaient rien. Le vent passait sur eux, à travers eux,
comme s'il n'y avait personne sur les dunes. Ils
marchaient depuis la première aube, sans s'arrêter, la
fatigue et la soif les enveloppaient comme une gangue. La
sécheresse avait durci leurs lèvres et leur langue. La
faim les rongeait. Ils n'auraient pas pu parler. Ils
étaient devenus, depuis si longtemps, muets comme le
désert, pleins de lumière quand le soleil brûle au centre
du ciel vide.
Jean-Marie Gustave Le Clézio,
Désert, 1980.
Brevet 2014
Beaucoup parmi les gens de la résistance passent la
plupart de leur temps dans les trains. On ne peut rien
confier au téléphone, au télégraphe, aux lettres. Tout
courrier doit être porté. Toute confidence, tout contact
exigent un déplacement. Et il y a les distributions
d'armes, de journaux, de postes émetteurs, de matériel de
sabotage. Ce qui explique la nécessité d'une armée
d'agents de liaison qui tournent à travers la France
comme des chevaux de manège. Ce qui explique aussi les
coups terribles qui les atteignent. L'ennemi sait aussi
bien que nous l'obligation où nous sommes de voyager sans
cesse.
Joseph Kessel, L'Armée des
ombres, 1963.
Brevet 2013
Tous les émigrants n'étaient pas obligés de passer par
Ellis Island. Ceux qui avaient suffisamment d'argent pour
voyager en première ou en deuxième classe étaient
rapidement inspectés à bord par un médecin et un officier
d'état civil et débarquaient sans problèmes. Le
gouvernement fédéral estimait que ces émigrants auraient
de quoi subvenir à leurs besoins et ne risqueraient pas
d'être à la charge de l'Etat. Les émigrants qui devaient
passer par Ellis étaient ceux qui voyageaient en
troisième classe […] dans de grands dortoirs non
seulement sans fenêtres mais pratiquement sans aération
et sans lumière, où deux mille passagers s'entassaient
sur des paillasses superposées.
Georges Perec, Ellis
Island, 1980
Brevet 2012
Puis, une clameur s'éleva, où l'on distinguait les
voix aiguës et les sauts de joie des enfants. Et il y eut
une rentrée triomphale : Gervaise portait l'oie, les bras
raidis, la face suante, épanouie dans un large rire
silencieux ; les femmes marchaient derrière elle, riaient
comme elle ; tandis que Nana, tout au bout, les yeux
démesurément ouverts, se haussait pour voir. Quand l'oie
fut sur la table, énorme, dorée, ruisselante de jus, on
ne l'attaqua pas tout de suite.
Emile Zola, L'Assommoir,
1877.
Brevet 2011
Je dois vous dire aussi que j'ai contracté, en
captivité, une dette envers les éléphants dont j'essaye
seulement de m'acquitter. C'est un camarade qui avait eu
cette idée, après quelques jours de cachot - un mètre dix
sur un mètre cinquante - alors qu'il sentait que les murs
allaient l'étouffer, il s'était mis à penser aux
troupeaux d'éléphants en liberté - et, chaque matin, les
Allemands le trouvaient en pleine forme, en train de
rigoler : il était devenu increvable.
Romain Gary, Les racines du ciel,
1954.
Brevet 2010
La mer est partie si loin qu'elle ne reviendra
peut-être plus jamais ?… Si, elle reviendra, traîtresse
et furtive comme je la connais ici. On ne pense pas à
elle ; on lit sur le sable, on joue, on dort, face au
ciel, jusqu'au moment où une langue froide, insinuée
entre vos orteils, vous arrache un cri nerveux : la mer
est là, toute plate, elle a couvert ses vingt
kilomètres de plage avec une vitesse silencieuse de
serpent. Avant qu'on l'ait prévu, elle a mouillé le
livre, noirci la jupe blanche, noyé le jeu de croquet et
le tennis.
D'après Colette, "Partie de pêche
», Les Vrilles de la vigne, 1908.
Brevet 2009
Dans les villages, on ne lui donnait guère : on le
connaissait trop ; on était fatigué de lui depuis
quarante ans qu'on le voyait promener de masure en masure
son corps loqueteux et difforme sur ses deux pattes de
bois. Il ne voulait point s'en aller cependant, parce
qu'il ne connaissait pas autre chose sur la terre que ce
coin de pays, ces trois ou quatre hameaux où il avait
trainé sa vie misérable. Il avait mis des frontières à sa
mendicité.
Maupassant, Contes du jour et de
la nuit, 1885.
Brevet 2008
Ce jour-là, ils traînaient le long des chemins et
leurs pas semblaient alourdis de toute la mélancolie du
temps, de la saison et du paysage. Quelques-uns
cependant, les grands, étaient déjà dans la cour de
l'école et discutaient avec animation. Le père Simon, le
maître, sa calotte en arrière et ses lunettes sur le
front, dominant les yeux, était installé devant la porte
qui donnait sur la rue. Il surveillait l'entrée,
gourmandait les traînards, et, au fur et à mesure de leur
arrivée, les petits garçons, soulevant leur casquette,
passaient devant lui, traversaient le couloir et se
répandaient dans la cour.
Louis Pergaud, La guerre des
boutons, 1912.
Brevet 2007
L'homme baissa la tête, ramassa le sac qu'il avait
déposé à terre, et s'en alla. Il prit la grande rue. Il
marchait devant lui au hasard, rasant de près les
maisons, comme un homme humilié et triste. Il ne se
retourna pas une seule fois. S'il s'était retourné, il
aurait vu l'aubergiste de La Croix-de-Colbas sur le seuil
de sa porte, entouré de tous les voyageurs de son auberge
et de tous les passants de la rue, parlant vivement et le
désignant du doigt, et, aux regards de défiance et
d'effroi du groupe, il aurait deviné qu'avant peu son
arrivée serait l'événement de toute la ville.
Victor Hugo, Les
Misérables, 1862.