Guerre et poésie

Problématique générale : La poésie, objet décoratif ou arme de combat ?

Séance 01

Rappeler Roland

Présentation

Séance 02

Contre la guerre

Lecture

Je veux peindre la France une mère affligée,

Qui est, entre ses bras, de deux enfants chargée.

Le plus fort, orgueilleux, empoigne les deux bouts

Des tétins nourriciers ; puis, à force de coups

D'ongles, de poings, de pieds, il brise le partage

Dont nature donnait à son besson l'usage ;

Ce voleur acharné, cet Esaü malheureux,

Fait dégât du doux lait qui doit nourrir les deux,

Si que, pour arracher à son frère la vie,

Il méprise la sienne et n'en a plus d'envie.

Mais son Jacob, pressé d'avoir jeûné meshui,

Ayant dompté longtemps en son cœur son ennui,

À la fin se défend, et sa juste colère

Rend à l'autre un combat dont le champ et la mère.

Ni les soupirs ardents, les pitoyables cris,

Ni les pleurs réchauffés ne calment leurs esprits ;

Mais leur rage les guide et leur poison les trouble,

Si bien que leur courroux par leurs coups se redouble.

Leur conflit se rallume et fait si furieux

Que d'un gauche malheur ils se crèvent les yeux.

Cette femme éplorée, en sa douleur plus forte,

Succombe à la douleur, mi-vivante, mi-morte ;

Elle voit les mutins tout déchirés, sanglants,

Qui, ainsi que du cœur, des mains se vont cherchant.

Quand, pressant à son sein d'une amour maternelle

Celui qui a le droit et la juste querelle,

Elle veut le sauver, l'autre qui n'est pas las

Viole en poursuivant l'asile de ses bras.

Adonc se perd le lait, le suc de sa poitrine ;

Puis, aux derniers abois de sa proche ruine,

Elle dit : "Vous avez, félons, ensanglanté

Le sein qui vous nourrit et qui vous a porté ;

Or vivez de venin, sanglante géniture,

Je n'ai plus que du sang pour votre nourriture !

Agrippa d'Aubigné, Les Tragiques, Livre I, Misères, vers 97 à 130.

Séance 03

Et la guerre et l'amour...

Oral

Combattu des vents et des flots,

Voyant tous les jours ma mort prête,

Et abayé d'une tempête

D'ennemis, d'aguets, de complots,


Me réveillant à tous propos,

Mes pistolets dessous ma tête,

L'amour me fait faire le poète,

Et les vers cherchent le repos.


Pardonne moi, chère maîtresse,

Si mes vers sentent la détresse,

Le soldat, la peine, et l'émoi :


Car depuis qu'en aimant je souffre,

Il faut qu'ils sentent comme moi

La poudre, la mèche, et le souffre.