Observez la mise en scène de Jean Lambert-wild, Lorenzo Malaguerra et Marcel Bozonnet. Que pensez-vous du personnage de Lucky ?
1. En vous appuyant sur les ordres donnés par Pozzo, indiquez comment progresse cet extrait.
2. Quel genre de maître semble être Pozzo lors de son entrée en scène ?
3. Montrez le contraste entre la façon dont il traite les deux vagabonds et celle dont il traite son serviteur.
4. Comment se manifestent, à la fin de l'extrait, la grossièreté et le mépris de Pozzo ?
Cette scène vous paraît-elle "absurde" ?
Dans cette pièce écrite peu après la guerre, deux vagabonds, Vladimir et Estragon, attendent, au milieu de nulle part, un dénommé Godot, sans qu'on sache pourquoi. Soudain arrivent deux personnages : Pozzo et Lucky, attaché au bout d'une corde.
En attendant Godot, mise en scène de Jean Lambert-wild, Lorenzo Malaguerra et Marcel Bozonnet au théâtre de l'Union, Caen, 2015 (de 2' à 2'30 et de 3'10 à 4'42).
POZZO (d'un geste large). Ne parlons plus de ça. (Il tire sur la corde.) Debout ! (Un temps.) Chaque fois qu'il tombe il s'endort. (Il tire sur la corde.) Debout, charogne ! (Bruit de Lucky qui se relève et ramasse ses affaires. Pozzo tire sur la corde.) Arrière ! (Lucky entre à reculons.) Arrêt ! (Lucky s'arrête.) Tourne ! (Lucky se retourne. À Vladimir et Estragon, affablement.)
Mes amis, je suis heureux de vous avoir rencontrés. (Devant leur expression incrédule.) Mais oui, sincèrement heureux. (Il tire sur la corde.) Plus près ! (Lucky avance.) Arrêt ! (Lucky s'arrête. À Vladimir et Estragon.) Voyez-vous, la route est longue quand on chemine tout seul pendant... (Il regarde sa montre)... pendant (il calcule)... six heures, oui, c'est bien ça, six heures à la file, sans rencontrer âme qui vive. (À Lucky.) Manteau ! (Lucky dépose la valise, avance, donne le manteau, recule, reprend la valise.) Tiens ça. (Pozzo lui tend le fouet, Lucky avance et, n'ayant plus de mains, se penche et prend le fouet entre ses dents, puis recule. Pozzo commence à mettre son manteau, s'arrête.) Manteau ! (Lucky dépose tout, avance, aide Pozzo à mettre son manteau, recule, reprend tout.) Le fond de l'air est frais. (Il finit de boutonner son manteau, se penche, s'inspecte, se relève.) Fouet ! (Lucky avance, se penche, Pozzo lui arrache le fouet de la bouche, Lucky recule.) Voyez-vous, mes amis, je ne peux me passer longtemps de la société de mes semblables, (il regarde les deux semblables) même quand ils ne me ressemblent qu'imparfaitement. (À Lucky.) Pliant ! (Lucky dépose valise et panier, avance, ouvre le pliant, le pose par terre, recule, reprend valise et panier. Pozzo regarde le pliant.) Plus près ! (Lucky dépose valise et panier, avance, déplace le pliant, recule, reprend valise et panier... Pozzo s'assied, pose le bout de son fouet contre la poitrine de Lucky et pousse.) Arrière ! (Lucky recule.) Encore. (Lucky recule encore.) Arrêt ! (Lucky s'arrête. À Vladimir et Estragon.) C'est pourquoi, avec votre permission, je m'en vais rester un moment auprès de vous, avant de m'aventurer plus avant. (À Lucky.) Panier ! (Lucky avance, donne le panier, recule.) Le grand air, ça creuse. (Il ouvre le panier, en retire un morceau de poulet, un morceau de pain et une bouteille de vin. À Lucky.) Panier ! (Lucky avance, prend le panier, recule, s'immobilise.) Plus loin ! (Lucky recule.) Là ! (Lucky s'arrête.) Il pue. (Il boit une rasade à même le goulot.) À la bonne nôtre. (Il dépose la bouteille et se met à manger.)
Silence.
Samuel Beckett, En attendant Godot, I, 1953, éd. de Minuit.
Étudiez la négation dans : "je ne peux me passer longtemps de la société de mes semblables, même quand ils ne me ressemblent qu'imparfaitement."
1. Transformez la phrase suivante de façon à introduire une négation totale ; expliquez les changements effectués : "Mes amis, je suis heureux de vous avoir rencontrés".
2. Transformez les phrases suivantes de façon à introduire une négation partielle dans chacune ; expliquez les changements effectués : : "Il tire sur la corde", "la route est longue quand on chemine tout seul".