INSPE ANGERS - FRANÇAIS

Analyse de l'activité

La progression et la programmation

La bonne éducation

Àtant son père aperceut, que vrayment il estudioyt tresbien et y mettoit tout son temps, toutesfoys qu’en rien ne prouffitoyt. Et que pys est, qu’il en devenoyt fou niays tout resveux et rassoté.

Rabelais, F. (1535). Gargantua. Comment Gargantua fut mys soubz aultres pedaguoges. Chapi. xv.

Un peu de vocabulaire

Une définition institutionnelle des termes, stabilisée en 1996 dans les documents d'accompagnement, distinguait deux niveaux de cette activité : concevoir une progression (déterminer un ordre des notions et séquences successives pour établir un itinéraire dans les apprentissages) et fixer une programmation (distribuer chronologiquement séquences et séances dans le calendrier scolaire en tenant compte de ses contraintes). À ce niveau, progression et programmation relèvent de cette activité centrale de l'enseignant qu'est la planification, définie par Tochon comme l'"organisation cognitive relative à l'activité de préparation des leçons" selon différentes échelles de temps (annuelle, mensuelle, hebdomadaire, journalière).

Nonnon, É. (2010). La notion de progression au cœur des tensions de l'activité d'enseignement. Repères, 41, 5‑34.

Étude de document n°1

Étudiez cet exemple de programmation annuelle. Quelles remarques vous inspire-t-il ?

Les différents types de programmation

Plusieurs types de progressions existent dans le domaine de l'éducation : la progression linéaire, qui présente les objets à enseigner du plus simple au plus complexe, la progression par accumulation, qui découpe en parties les objets à enseigner pour en comprendre l'ensemble, et la progression spiralaire, qui permet l'étude du phénomène par approfondissements successifs. Pour l'enseignement du français, la progression spiralaire fait consensus chez les didacticiens, puisqu'elle permet non seulement d'intégrer les deux autres types de progression, mais également de tenir compte de la complexité des phénomènes de langue à l'étude.

Boublil-Ekimova, H., & Stan, C. A. (2018). Macroplanification en enseignement : Principes, concepts et critères. Presses de l’Université Laval.

Les différentes focales

On peut envisager une programmation organisée autour des savoirs ou autour des compétences ; le Québec organise depuis longtemps la programmation autour de compétences et si la France a longtemps privilégié les savoirs comme organisateurs des programmes, la tendance est clairement à un infléchissement vers les compétences (cf. le "socle commun de connaissances et de compétences" en parallèle des programmes). Cet infléchissement est le fruit d'un long processus, qui a conduit, dans la plupart des pays occidentaux, à ce "nouveau pilotage des enseignements scolaires" (Lebeaume, 2011, p. 7), qui a pour effet, en vertu d'une certaine transversalité des compétences affichées, "un ébranlement voire une déconstruction des disciplines scolaires" dans la scolarité obligatoire (ibid.).

Reuter, Y., Cohen-Azria, C., Daunay, B., Delcambre, I. & Lahanier-Reuter, D. (2013). Dictionnaire des concepts fondamentaux des didactiques. Louvain-la-Neuve: De Boeck Supérieur.

Les paliers de progression

Le travail de définition des paliers d'une compétence consiste à déterminer des niveaux de difficulté et/ou de complexité progressifs, chaque palier représentant un énoncé de niveau supérieur par rapport au précédent. Pour déterminer ces paliers, on peut agir sur différentes variables. [...] Supposons par exemple qu'en français, on travaille sur une compétence d'argumentation d'une position sur un thème donné, comme l'utilisation des téléphones portables en classe, ou le tabagisme ; on peut avoir une progression "matière", sous la forme d'apprentissages des ressources langagières, qui se combine avec un aspect "démarches", visant un niveau croissant d'autonomie de l'élève dans le développement de la compétence : par exemple, l'élève commence par reconnaître les arguments pertinents suite à la lecture réfléchie d'un document (palier 1), ensuite il complète une liste d'arguments par d'autres (palier 2), enfin, il produit lui-même un point de vue personnel argumenté (palier 3)…

Roegiers, X. (2011). Curricula et apprentissages au primaire et au secondaire : La Pédagogie de l'Intégration comme cadre de réflexion et d'action (pp. 203-222). Louvain-la-Neuve: De Boeck Supérieur.

L'ordre des raisons

Ce sont des conceptions différentes de l'écriture et de son apprentissage qui justifient que l'on suppose préférable, au début du XXe siècle, de programmer l'apprentissage de l'écriture au primaire en allant du mot à la phrase puis au texte, alors qu'on juge possible actuellement de confronter rapidement les élèves à l'écriture complexe de textes dès les premiers apprentissages, avant même que l'élève sache graphier (notamment par la dictée à l'adulte). De même, ce sont des conceptions différentes de la lecture et de son apprentissage qui font passer d'une logique de la lecture progressive (on apprend d'abord à déchiffrer pour ensuite lire des textes de plus en plus longs) à une logique de la lecture comme pratique en partie indépendante du décodage (on lit des albums dès la maternelle, avant même de savoir déchiffrer).

Reuter, Y., Cohen-Azria, C., Daunay, B., Delcambre, I. & Lahanier-Reuter, D. (2013). Dictionnaire des concepts fondamentaux des didactiques. Louvain-la-Neuve: De Boeck Supérieur.

Étude de document n°2

Observez le document élaboré au sein de l'Académie de Nantes. Quelles remarques vous inspire-t-il ?

Programmation et évaluation

La part des enseignants dans la gestion optimale des progressions s'est considérablement élargie lorsqu'on a renoncé aux plans d'études prescrivant une progression semaine par semaine. Un nouvel élargissement se dessine avec l'introduction de cycles d'apprentissages pluriannuels. De plus, la progression de la classe n'est plus le seul souci. Le mouvement vers l'individualisation des parcours de formation et la pédagogie différenciée conduit à penser la progression de chaque élève. Sur le papier, rien n'est plus simple que de savoir constamment où en est chacun et de réguler son parcours en conséquence. C'est ce que font les contrôleurs aériens avec les vols qui leur sont confiés, ou les personnels soignants avec les patients hospitalisés. Le suivi personnalisé est relativement facile si on dispose d'un ratio favorable entre le nombre de trajectoires à suivre, d'informations à recueillir et à interpréter, de microdécisions à prendre, d'une part, et d'autre part, le nombre de professionnels affectés à ces tâches. [...] Devant ces difficultés, on se doute qu'à l'école, le suivi personnalisé sera toujours imparfait.

Perrenoud, P. (1999). Dix nouvelles compétences pour enseigner. ESF éditeur.

Programmation et différenciation

Conférence interactive du CNESCO, 2018, de 17min30sec à 25min.

Prochain rendez-vous

En 2024 pour les journées de formation des professeurs stagiaires 😉