Les stages - côté tuteur

01Le rôle du tuteur/formateur

Les règles de métier correspondent à la façon dont une communauté professionnelle (ici la communauté enseignante) s'accorde à un instant donné sur ce qu'est le métier (ici, celui d'enseignant). Elles caractérisent en quelque sorte un genre professionnel partagé par les enseignants, indépendamment de leur discipline. [...]

L'observation de la leçon

Quatre actions sont à effectuer par le tuteur pendant l'observation d'une leçon conduite par un enseignant stagiaire (ES).

1. Il pose un jugement professionnel sur l'activité de l'ES en diagnostiquant le niveau de maîtrise de chacun des éléments constitutifs des règles de métier.

2. Il signifie l'activité de l'ES en ciblant la ou les règles de métier à traiter prioritairement dans l'entretien conseil c'est-à-dire le "chantier professionnel" central ouvert par l'observation récurrente de difficultés. [...]

3. Il étaye son jugement en relevant des preuves tangibles identifiées lors de l'observation de l'activité de l'ES et/ou des élèves.

4. Il conseille, c'est-à-dire qu'il note des pistes pour faire progresser le "chantier professionnel " repéré. [...]

La conduite de l'entretien conseil

La conduite de l'entretien conseil se décline en cinq étapes.

1. En préliminaire, le tuteur présente à l'ES la manière dont l'entretien conseil va se dérouler, le rôle de chacun et les outils d'observation et de conseil qu'il utilise.

2. Le tuteur indique les règles de métier maîtrisées et/ou en progrès de façon succincte. L'objectif est de réaliser une entrée bienveillante dans l'entretien conseil afin que l'ES puisse s'exprimer sans retenue.

3. Le tuteur aborde les règles de métier non maîtrisées. Il convient d'en choisir un nombre restreint pour ne pas submerger l'ES et pouvoir en approfondir l'examen.

Si l'on constate l'absence d'une règle de métier (ou d'un de ses éléments), le tuteur la nomme, fournit un exemple "exemplaire" et précise le résultat attendu lorsqu'elle est mise en œuvre, et cela de manière ostensive parce que les règles de métier ne sont pas discutables (le genre professionnel).

Par exemple, le tuteur indique au stagiaire qu'il a omis de vérifier la compréhension des consignes par les élèves (règle de métier : présenter une situation). Il lui fournit un exemple ("demande à un élève de démontrer ce que tu viens de dire") et le résultat attendu ("les élèves parviennent rapidement à réaliser ce que tu as demandé").

Ensuite, le tuteur s'engage avec l'ES dans une construction collective des pistes permettant de faire progresser le "chantier professionnel". Celle-ci s'engage à partir de la discussion de l'exemple afin de permettre à l'ES de s'approprier la règle de métier (le style professionnel). Il peut, par exemple, exprimer un doute sur sa capacité à mettre en œuvre l'exemple fourni ("je ne me vois pas faire ça"), le tuteur pouvant alors lui proposer une autre piste ("tu peux questionner les élèves") qui sera accueillie plus favorablement ("oui, je préfère leur demander de reformuler ce que je dis en prenant un élève au hasard"). La proposition ne doit pas être imposée mais véritablement émerger d'une co-construction. En effet, en l'absence de son adhésion, tout conseil sera contre-productif en particulier lorsque l'ES agit pour "faire plaisir".

Si l'on constate un usage inadéquat d'une règle de métier (ou d'un de ses éléments), le tuteur la nomme, donne la parole au stagiaire pour qu'il qualifie son activité (" qu'est-ce que tu penses de ta délivrance des consignes ?"… " c'est peut-être un peu long") puis le tuteur la juge à son tour ("oui, je trouve qu'elle est trop longue pour des 6 e "). Ce jugement du tuteur peut être en adéquation ou en décalage avec celui de l'ES, mais il l'étaye en fournissant des preuves issues de l'observation ("ça a duré 8 minutes" et "les élèves discutaient"). Il rappelle le résultat attendu d'un suivi adéquat de la règle considérée ("ça doit être court pour que les élèves retiennent les informations") et multiplie les exemples ("tu pourrais intégrer des éléments de la présentation de la situation pour gagner du temps, par exemple, en effectuant ta démonstration sur le terrain et non devant le tableau", ou bien "en hiérarchisant les informations à donner", ou encore "en utilisant des images pour les captiver, etc."). On s'engage ainsi dans une construction collective à partir de la discussion des exemples.

Le tuteur doit clairement distinguer, dans son activité de conseil, le genre (les règles de métier) et le style (la manière singulière dont chaque enseignant en use). Il conseille à partir du genre professionnel même s'il peut ponctuellement, et avec prudence, mobiliser sur le style professionnel, en termes d'illustration et non de prescription. Généralement, le conseil se joue dans une double temporalité (apprentissage du genre et construction du style) et l'objectif est bien d'amener l'ES à construire son propre style professionnel à partir du genre professionnel.

4. Les pistes retenues sont actées entre l'ES et les tuteurs. La date de la visite suivante est fixée collectivement et son objet, aider à l'accompagnement des tentatives de mise en œuvre des propositions, précisé. Le tuteur ne sera pas dans l'obligation d'assister à l'ensemble de la leçon : il peut être pertinent de venir voir seulement le moment particulier où la piste est mise en œuvre ("je viendrai voir ta prise en main lundi prochain"). Il apparaît également intéressant d'alterner des visites rapprochées (du constat d'un "chantier professionnel" jusqu'à sa finalisation) et d'autres plus distantes afin que l'ES puisse stabiliser son activité professionnelle et se ressourcer.

5. L'entretien conseil s'ouvre sur une discussion, selon la même démarche [...] pour analyser les règles de métier différées de l'intervention devant les élèves.

Gaudin, C., Perrot, F., Chaliès, S., Escalie Escalié, G., Raymond, J. (2014). La visite de stage: de l'observation au conseil à partir des règles de métier. EPS : Revue education physique et sport, pp.38-41.

02Questions fréquentes

Pour les stagiaires SPA

Comment garder les stagiaires à jour ?

Beaucoup de choses se passent pendant la semaine. Lorsque les stagiaires arrivent le jeudi, il y a beaucoup d'informations à transmettre. Pour que ce temps de concertation ne devienne pas trop lourd, je conseillerais de déposer dans un casier les documents de la semaine, afin que le stagiaire puisse en prendre connaissance quand il arrive. Ou, si c'est possible, de demander à l'administration de créer un accès à Pronote pour que les stagiaires puissent suivre le cahier de textes.

Comment aider les stagiaires à faire cours ?

Il vaut mieux, je pense, commencer modestement, et lui proposer de se glisser, quand il se sent prêt, dans vos cours : prendre en charge une activité que vous avez prévue, un moment du cours... Il ne faut pas hésiter à proposer au stagiaire de faire cours avec vos préparations.

Co-construire des séances est très formateur mais demande beaucoup de temps. Les étudiants doivent à la fois faire cours, valider un master et passer un cours. Il faut faire attention à ne pas vous/lui prendre trop de temps.

Pour les stagiaires ECA/DIU

Quelle fréquence pour les visites ?

Pas de règle dans ce domaine. Une visite par mois environ, au début, paraît un rythme intéressant de part et d'autre : il est important que le stagiaire vienne vous voir, et que vous alliez le voir.

Comment mettre à profit les séances d'observation ?

À mon sens, ces séances gagnent à être focalisées sur une question, un point à définir, avec votre stagiaire, en fonction de ses besoins, de ses souhaits, de vos possibilités : par exemple la gestion des seuils, la passation de consignes, l'activité des élèves...